« De la fin des années 30 jusque dans les années 70, le black gospel traditionnel a connu son Âge d’Or et un engouement énorme et généralisé dans les communautés africaines américaines, alors qu’il était ignoré ou presque partout ailleurs (1). Mais le gospel, comme toutes les musiques populaires, a évolué et, de nos jours, c’est un gospel dit « contemporain » (très proche de la soul music, de la pop et du rap) qui a les faveurs du public noir US, pendant que l’Europe et le reste du monde découvrent enfin les trésors du gospel traditionnel grâce à des compagnies comme Ace Records en Angleterre, Gospel Friend en Suède, Frémeaux et Associés en France et une poignée d’autres, qui rééditent la crème de la crème de ce style musical exceptionnel (2) et ses bonnes nouvelles (… « Good News, la vie est courte et dure, voire abominable, mais ensuite, pour les Justes, ce sera le bonheur et la joie pour l’éternité »…). (3) C’est dans cette période que les femmes, solistes ou membres de groupes (mixtes ou entièrement féminins) avec piano et orgue, ont pris le plus d’ascendant dans ce monde musical, souvent plus populaires que les solistes et les quartets masculins a capella, une juste revanche sur le machisme des périodes précédentes. La preuve avec cette nouvelle compilation recommandée sans réserves : Le cd1 couvre la période 1940-1953 avec les grandes pionnières à Chicago comme Sallie Martin et sa fille Cora (associées à Thomas A. Dorsey, le Père du Gospel), Roberta Martin (pianiste, associée à Kenneth Morris), Albertina Walker et les Caravans, les Gay Sisters ; à Philadelphie avec Gertrude Ward, sa fille Clara et leurs Singers (Marion Williams, Frances Steadman, Kitty Parham) et avec les Davis Sisters ; à Memphis avec les Brewster Singers ; à Birmingham (Alabama) avec Dorothy Love Coates et les Gospel Harmonettes, etc, etc. Ces groupes et d’autres (4) vont déchaîner les passions et remplir les églises et lieux où ils se produisent. Ils vont abondamment enregistrer et c’est un bonheur total de réécouter leurs disques. Pour la plupart, leurs succès se perpétueront dans les périodes suivantes comme on peut le voir (l’écouter !) dans le cd2 (années 50) et le cd3 (1958-1962). Les notes de pochette de Jean Buzelin sont informatives et complètes, il a judicieusement choisi les meilleurs titres qui représentent bien le génie et la qualité des interprètes, leur fougue et leur talent, leur swing implacable et leur engagement total, sans complexes. On n’en citera aucun en particulier, tous sont à écouter… religieusement ! Une réussite totale. »
Par Robert SACRE – ABS MAGAZINE