« (...) Le disque prolonge le travail accompli pour la radio : " La radio m'a amené à passer par le gueuloir ce que j'écrivais." La diction de Gerber est proche de sa façon d'écrire. Pour ses premiers romans, il pouvait " passer la nuit sur une phrase" prise, reprise, démantibulée, reconstruite, abandonnée, restructurée. "A présent, pour la première fois, j'écris de la façon dont les jazzmen improvisent. Je ne me relis plus. L'essentiel est de tenir la pulsation."
Le mot est lâché. Il est l'une des vérités du jazz. Et ne comptez pas sur Alain Gerber, tombé en amour avec la batterie, pour l'oublier. A Belfort, les nouveautés discographiques arrivaient au compte-gouttes au début des années 1960. " J'imaginais la musique contenue dans les 33 tours à partir des chroniques de disques paraissant dans Jazz Magazine." Un jour, à la fin de l'année 1963, son sang ne fait qu'un tour à la lecture d'un article s'en prenant à Daniel Humair. A l'époque, le batteur suisse installé en France n'est pas encore un musicien consacré. Gerber adresse une missive en forme de plaidoyer. " Rédacteur en chef du mensuel, Jean-Louis Ginibre m'a proposé d'écrire dans Jazz Magazine." Son premier article paraît en 1964. Aux côtés de Lucien Malson, Philippe Carles, Jean-Louis Comolli, Francis Marmande, Michel-Claude Jalard, Jean-Robert Masson ou Jacques Réda, il a participé à l'âge d'or de la revue, prenant fait et cause pour des musiciens de l'époque qui étaient parfois violemment décriés : Bill Evans ou Paul Desmond ont trouvé en Gerber le plus éloquent des défenseurs. »
Par Paul Benkimoun – LE MONDE