« Disparu en février 1991 (à 59 ans), James Cleveland n’était pas n’importe qui. Il fut en effet de ces pionniers qui surent affranchir le gospel, non seulement, du cercle (certes vaste) de l’église, mais aussi de la tutelle exclusive de compagnies de disques qui en limitaient la diffusion aux congrégations. C’est le docte Jean Buzelin qui s’est attaché à cette anthologie, suivant à la trace le parcours du Reverend, depuis son trio originel des Gospelaires jusqu’à la célèbre Angelic Choir (avec un tout jeune Billy Preston à l’orgue, tout juste réformé de ses frasques hambourgeoises auprès de Little Richard!), en passant par les Meditation Singers, Gospel All Stars, Voices Of Tabernacle et autres Gospel Chimes. Ses arrangements ne s’éloignent souvent guère du blues pianistique urbain de Leroy Carr et Big Maceo (“Trouble In My Way”, “Good Enough For Me”), et avec son timbre rauque et éraillé, son influence sur le jeune Ray Charles est patente (“We’re Marching To Zion”, “That’s Why I Love Him So” – dont ce dernier n’eut qu’à modifier les paroles pour en faire son propre “Hallelujah I Love Her So” – ou “Lord Remember Me”, dont il tira “Drown In My Own Tears”), lequel s’assura en outre les services de choristes féminines (ses fameuses Raelets) en tout point similaires à celles des chœurs de Cleveland. Son semi-talk-over “Meetin’ Tonight” et son talk-&-response sur “My Soul Looks Back And Wonders” sont à cet égard flagrants: on croirait presque y entendre le grand Ray d’alors! On peut affirmer sans risque que James Cleveland pava la route d’artistes de renommée internationale tels que le Golden Gate Quartet, Paul Robeson, Sam Cooke et Mahalia Jackson (“Yes Lord”), sans oublier bien entendu sa plus illustre élève, Aretha Franklin (dont il supervisa en personne le classique “Amazing Grace”). Comme d’ordinaire remarquablement transférés et mastérisés, 49 titres confirmant à l’envi pourquoi le dimanche matin succède sans problème au samedi soir! »
Par Patrick DALLONGEVILLE – PARIS MOVE