« C’est à la violoniste Mathilde Febrer que je fais confiance pour assurer le relais avec l’alter ego, le double et le contraire en tout de Django, Stéphano Grappelly comme il aimait se faire appeler à ses débuts. Elle a su puiser pour son premier album en leader dans le vaste répertoire où le maître du violon s’est distingué jusqu’aux standards qu’il aimait jouer comme I remember April ou Douce France. Grappelli que l’on reconnaît également dès les premières notes l’a “accompagnée” pendant une année, le temps de mettre au point ce disque enjoué, merveilleusement swing qui vous donnera envie de remuer de la tête aux pieds. Avec en filigrane cet Echoes of France de Reinhardt et Grappelli et l’empreinte du quintet historique du Hot Club de France, cet album tente de rapprocher sous le signe de la reconnaissance standards de Django (Daphné), originaux de Grappelli, ses vibrantes musiques de film Milou en Mai (c’est le titre de l’album) du regretté Louis Malle et Les Valseuses de Bertrand Blier.
La musicienne qui a choisi le jazz après de sérieuses études classiques (on l’entend sur la Partita n°1 de Jean Sébastien Bach), a su composer des arrangements d’une grande finesse sans qu’il soit question de copies conformes, ni de “revivalisme” plus ou moins intégriste. Le sextet constitué pour l’occasion redonne des couleurs avec des références tout autres qu’ajoute par instant la violoniste, courtes échappées qui pulsent, frisent, s’enroulent autour du motif principal. Sur les douze titres que l’on laisse filer sur la platine, on remarque ainsi quatre thèmes de sa plume, petit échantillon de ce qu’elle sait faire comme cet émouvant Blues for Stéphane, cette Valse du Grand Paris où l’accordéon de Christophe Lampidecchia partage avec elle le premier rôle, une Ballade de l’Espérance chaloupée joliment. Et encore ce Japan Feeling pour le producteur et directeur du label Respect Record Kenishi Takahashi.
Soliste virtuose, Mathilde Febrer a su s’entourer de la fine fleur des jazzmen hexagonaux, le formidable pianiste Alain Jean Marie qui sait ce qu’accompagner veut dire (splendide sur le Jitterbug Waltz de Fats Waller), Jean Marie Ecay à la guitare et Samy Daussat qui font souffler l’esprit manouche dans lequel on se perd volontiers sans oublier le tandem rythmique de Julien Charlet à la batterie et Yves Torchinsky à la contrebasse. Un album au charme certain, délicieusement entraînant qui a su conjuguer le souvenir à tous les temps. »
Par Sophie CHAMBON – FRAGILE