« Le fils de Maurice et Claudia Perret qui tenait le Café du pont – un restaurant qui lui a inspiré un livre de souvenirs – était du genre timide et, à son arrivée à Paris, il a fallu qu’un Brassens l’encourage pour qu’il se mette à écrire et à composer vraiment. En 1956, c’est une jeune fille déterminée, Françoise Marin (qui était née Sophie Makhno), un premier amour, qui le pousse à lui écrire des chansons. C’est accompagnée à la guitare par cet illustre inconnu qu’elle débute dans la chanson au cabaret « La Colombe » notamment, et on retrouve dans ce coffret ses interprétations de La Jeunesse, Quand la java tourne… Toute une époque. C’est le patron du lieu, un découvreur de talent, Michel Valette, qui le pousse à monter sur scène. Pierre Perret y remporte ses premiers succès et gagne un peu en confiance.
Un an plus tard, accompagnant Françoise Marin (future Françoise Lô) aux « Trois Baudets », célèbre cabaret de Jacques Canetti, Pierre Perret est repéré par Boris Vian et Émile Hebey, manager de Gilbert Bécaud et Charles Trenet. Par son entremise, l’artiste signe un contrat chez Barclay. C’est pour son premier 45 tours qu’il compose Moi, j’attends Adèle, qui ouvre Les Premières chansons de Pierret Perret 1957-1962 ou encore l’étonnant Moulin à café. C’est dans les bureaux de sa maison de disque que Pierre Perret raconte Simone Mazaltarim : il l’épousera en 1962 et la rebaptisera des années plus tard, Rebecca.
Si le style de Pierre Perret est déjà bien présent, son sens des ellipses, sa malice, dans les premières chansons comme Sex-appeal d’Émile – où l’on ressent l’influence d’un Brassens avec des vers du style « A ces dames, cell’s de charité/Qui vous réclament d’ la brutalité/ Et qui prennent l’air immaculé/ Pour qu’on égrène tout leur chapelet. » – Onésime ou encore La Chanson du malin, il ne remporte pas du premier coup les faveurs du public. Pire, une méchante pleurésie va le tenir éloigné du métier durant quelques mois. Deux ans à ronger son frein et à se refaire une santé en Haute Savoie pendant lesquels il s’en sort grâce à un Musicora exceptionnel organisé pour aider sa famille et payer les soins.
De retour sur le devant de la scène en 1959, ses nouvelles chansons ne cartonnent toujours pas et Pierre Perret travaille aussi pour d’autres comme en témoigne ce coffret où l’on retrouve un titre étonnant signé pour Gloria Lasso, Oh ! Quelle fête ou Toi tu causes, chanté par Colette Deréal. C’est en signant chez Vogue avec un nouvel impresario nommé Lucien Morisse, le fameux responsable de la programmation musicale de Europe 1, que Pierre Perret connaîtra ensuite son premier succès, inspiré par des scènes inspirées par le café paternel, Le Tord-Boyaux. Le succès ne se démentira alors pas.
Il est donc réjouissant de replonger dans les débuts du chanteur avec des titres oubliés comme Don Quichotte et Sancho Pança, deux voyageurs qui « aux douaniers ne montraient pas leur passeport« , sorti en 1960 dans un album chez Barclay et dont, pour la petite histoire, le dessin au recto de la pochette était l’œuvre d’un autre gai luron, un certain Siné. On pourra aussi retrouve avec la voix de la présentatrice de l’époque une version en public à la salle Pleyel de Moi, j’attends Adèle. Et une version musette de Robert Trabucco. Quelques vraies raretés. »
Par François CARDINALI - CHANTS SONGS