Gérard Tarquin – Cœur de Chauffe
Gérard Tarquin – Cœur de Chauffe
Ref.: FA477

COULEUR CACHEE

GERARD TARQUIN

Ref.: FA477

Label : Frémeaux & Associés

Durée totale de l'œuvre : 54 minutes

Nbre. CD : 1

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Présentation

Voici une formation qui joue la biguine de la manière la plus pure, la plus brillante, la plus authentique qui soit. Ce n’est pas étonnant. L’âme du groupe “Cœur de Chauffe” est le clarinettiste de souche martiniquaise Gérard Tarquin, ancien élève d’Eugène Delouche qui forma le légendaire “Del’s Jazz Biguine” dans les années trente. Gérard Tarquin, fondateur du fameux orchestre des “Haricots Rouges”, en est aujourd’hui l’un des principaux animateurs. Entouré des meilleurs interprètes de cette musique qui vient du cœur, il nous présente sa vision du répertoire traditionnel des Antilles, avec tout le feu de son enthousiasme et de sa séduction.'
Jean-Pierre Meunier

Couleur Cachée (Gérard Tarquin) • Edamyso (Ernest Léardée) • A Si Paré (Léona Gabriel) • La Guadeloupéenne (Albert Lirvat, Abel Beauregard) • Yaya Moin ni l’Agent (Folklore) • Oué Oué (La Grève Barré Moin) (A. Stellio, E. Léardée, L. Gabriel) • Mabillage Décollage (Léona Gabriel) • Bossu A (Folklore) • Femme Martinique Dou (Frantz Charles-Denis) • La Figuïe (Eugène Delouche) • An Lavalliè Fleuri (Hurard Coppet) • Moin Descenn’ Saint-Pierre (Folklore) • Retour au Pays (Eugène Delouche) • La Rue Zabyme (Folklore) • Shell X 100 Motor Oil (E. Delouche, L. Boislaville) • La Sirène (Louis Boislaville).
Droits audio : Groupe Frémeaux Colombini SAS en accord avec Gérard Tarquin. (Collection antilles, créole, biguine, French west indies, Cultures caribéennes, caraîbes).

Distribution Antilles : Hibiscus et Librairie Antillaise - Distribution France : Nocturne.



Couleur Cachée (Gérard Tarquin) • Edamyso (Ernest Léardée) • A Si Paré (Léona Gabriel) • La Guadeloupéenne (Albert Lirvat, Abel Beauregard) • Yaya Moin ni l’Agent (Folklore) • Oué Oué (La Grève Barré Moin) (A. Stellio, E. Léardée, L. Gabriel) • Mabillage Décollage (Léona Gabriel) • Bossu A (Folklore) • Femme Martinique Dou (Frantz Charles-Denis) • La Figuïe (Eugène Delouche) • An Lavalliè Fleuri (Hurard Coppet) • Moin Descenn’ Saint-Pierre (Folklore) • Retour au Pays (Eugène Delouche) • La Rue Zabyme (Folklore) • Shell X 100 Motor Oil (E. Delouche, L. Boislaville) • La Sirène (Louis Boislaville).

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Presse
                          L'ESPRIT CRÉOLE par vibrationsLe fabuleux destin des Antillais de Paris s’écrit sur plus d’un siècle. Où l’on se rend compte qu’il y a une vie avant et après le zouk.Il y a un siècle tout juste, au printemps 1902, la montagne Pelée raya d’un jet de lave et de poussière la ville de Saint-Pierre. A l’époque, la métropole martiniquaise forte de près de trente mille âmes était la capitale des Antilles françaises, et plus largement l’une des grandes cités de la créolité  caraïbe. Son rayonnement culturel allait bien au-delà des rivages. On y dansait et jouait de la biguine, la musique des salons d’une bourgeoisie métisse bourgeonnante. Née quelques décennies plus tôt, cette musique aux origines incertaines, dont même les plus fameux spécialistes ne se risqueraient pas à en expliquer le nom, combine le souvenir tenace des tambours africains à l’héritage du quadrille. Pour Jean-Pierre Meunier, spécialiste de la question à qui l’on doit de multiples rééditions sur le label Frémeaux, « il s’agit d’une interprétation de la polka à la manière africaine, marquée par les syncopes ». A chacun sa définition. Toujours est-il que quand on songe que la Louisiane fut française, quand on pense que les transactions commerciales et les migrations de population furent fréquentes entre les îles et la côte du Golfe du Mexique, on ne peut manquer de tisser un lien évident entre le jazz qui allait naître aux États-unis et la biguine dont le centre créatif venait de s’éteindre des suites de cette catastrophe naturelle. Jean-Christophe Averty osera même : « Si saint-Pierre n’avait pas été totalement détruite, le jazz y serait né ! ».Les instruments de la révolteÁ l’orée du vingtième siècle, le mento jamaïcain, le son cubain, la samba brésilienne apparaissaient, styles à l’évidence cousins de la biguine. Chacune de ces musiques nées en ville même les harmonies européennes aux cadences africaines, sur quelques accords de base et une trame mélodique appuyée. On pourrait de même rapprocher les instrumentations…Chacune conserve une part de l’héritage de la grande déportation, longtemps consigné dans des sociétés secrètes, plus ou moins syncrétiques. La biguine porte en elle les stigmates des lewoz et autres chants de veillée, dont elle s’affranchi en s’urbanisant, en même temps que l’esclavage est aboli. Dès lors, deux branches d’un même tronc vont se séparer pour ne se retrouver qu’un siècle et bien des péripéties plus tard. D’un côté, les tambours et la transe rythmique vont nourrir le terreau des mornes, ces petits monts arrondis des îles, des campagnes ; de l’autre, les cordes et la danse mélodique vont se développer sur le pavé des villes. « Mais l’esprit de la biguine a toujours été dans le ka », tempère Eric Vinceno, bassiste guadeloupéen qui a grandi avec les grands maîtres du genre mais qui a aussi retenu les leçons du jazz appris à Berklee. En 2002,il est temps pour sa génération de réunir enfin ces deux traditions. Il est temps de réexaminer à leur juste valeur le gwo ka et son équivalent martiniquais le bel-air, ces instruments ces instruments de la révolte, de la résistance à la colonisation. Ces longs fûts taillés dans les barriques de rhum conservent les origines de antillais, demeurent les porte-parole de leur originalité. « Le ka, ce n’est pas qu’un rythme et un tambour. C’est un phrasé, un sens mélodique. Il y a toute une dimension spirituelle », ajoute Vinceno. Tandis que la biguine devient l’emblème, puis le zouk, de la musique antillaise, le ka est rejeté aux oubliettes d’une histoire filtrée selon les critères politiques de la métropole. Il y a bien des raisons d’expliquer l’attitude de la France dans cette affaire, qui n’a jamais favorisé cette expression. Si la conga et le djembé n’ont pas de secrets pour le français moyen, le ka et le bel air font figures d’illustres inconnus pour la plupart. Ce n’est pas là l’un des moindres paradoxes de cette drôle d’histoire coloniale qui fit taire les tambours, bannir le créole de l’école jusque dans les années 60, tandis que nombre d’antillais affichaient l’envie de se blanchir, de s’assimiler pour réussir en s’intégrant au risque de se désintégrer…Précurseurs et passeurs« Pendant très longtemps, la musique antillaise a été parquée, réduite à la Compagnie créole et Kassav. Et pourtant depuis le début du siècle, les Antillais ont apporté beaucoup de musique dans leurs bagages. Mais les français ne se sont pas rendu compte que le chaînon manquant entre les États-unis et l’Europe, c’était les Antilles ! Les décideurs ont privilégié les Afro-américains ». L’écrivain et musicien Roland Brival ne cache pas son amertume face à une métropole qui a privilégié la voie « doudouiste », plus simple à contrôler que celle d’une réelle diversité, loin de tout exotisme bon teint, mais sans doute plus proche des discours indépendantistes. A toutes les époques, les Antillais ont été à la fois précurseurs et passeurs, conservant leur accent spécifique tout en adaptant avec aisance aux autres musiques. Pour Vinceno, « les Antillais ont plus de facilités à jouer tous les répertoires. Ils ont l’oreille. C’est sans dout du à notre culture créole ». Albert Lirvat, l’un des mentors de l’époque, précise : « Contrairement aux Cubains, nous avons la chance de pouvoir jouer n’importe quel style. Si on avait eu un conservatoire aux Antilles, on aurait sorti des musiciens extraordinaires ». Sans, ce n’est déjà pas si mal…De Félix Valvert, surnommé « roi de la rumba » dans le Paris des années 30 à Daddy Yod, « prophète » en son genre d’un dancehall à la française au milieu des années 80. Du virtuose Stellio, clarinettiste qui débarque avec la biguine du « serpent maigre » et un sens inné du swing dans le Paris des années folles, à Henri Guédon, qui fera chavirer tambour battant la capitale avec sa salsa. De Liquid Rock, trio en fusion dirigé par Alain Jean-Marie dès les années 60 aux grandes fanfares créoles d’Eddy Louiss…Et que dire de Vélo, véloce tambourinaire qui finira sur les trottoirs de Pointe-à-Pitre le 5 Juin 1984…Paris, terre d’accueilDes orchestres de « jazz » des années 20 aux solistes tels que que le saxophoniste Emilen Antile, le guitariste André Coudouant, le clarinettiste Robert Noisron, le pianiste Michel sradaby qui s’illustrèrent à la suite du bop, les Antilles ont envoyé des bataillons de musiciens, des générations d’excellents instrumentistes, mais pour peupler les longues nuits de séance studio plus que pour exprimer leurs différences de styles. Rares sont ceux qui réussiront à se faire un nom, à passer à la postérité du patrimoine national. Des pianistes en pagaille, des souffleurs en rafale, des tambours en série, des chanteurs d’exception…Des dynasties entières quand on songe aux Louiss, père et fils, à la fratrie Jean-Marie, à la famille Fanfant, de Roger directeur d’orchestre dans les années 20 à Jean-Philippe, qui a traversé le siècle et du mêm coup tout le spectre de la musique noire. Tous ceux-là seront bien là parmi les plus grands, bien peu sur le devant de la scène. Tous iront contre mauvaise fortune aller chercher la reconnaissance à Paris. « et sans doute inconsciemment une respectabilité ; Mais en même temps, ils étaient porteurs de leurs différences, des idées nouvelles nées aux États-unis », souligne Vinceno. L’émigration s’accélère avec l’exposition coloniale de 1931, où les soufflants antillais s’affichent tout pavillon dehors. C’est à la capitale que ces amateurs se professionnalisent, s’inspirent des autres musiques pour créer, même si la biguine tient alors le haut du pavé. Le phénomène va s’amplifier avec la guerre, et l’impossibilité pour les musiciens américains de venir swinguer. « La guerre a permis aux Antillais de remplacer les Américains dans les grands orchestres. Cela s’est fait naturellement d’autant que certains, comme Sam Castendet, avaient déjà gravé des pièces de jazz avant-guerre. Ils jouaient à l’identique. Un musicien comme Mavounzy était capable de tout mémoriser et rejouer, ajoutant un petit vibrato très personnel », analyse Jean-Pierre Meunier. Le jazz, les musique cubaines et autres versions latines n’ont plus aucun secret pour les antillais. Mais l’âge d’or de la biguine se situe dans l’après guerre et les années 1950. C’est l’époque des grands lieux qui font courir le tout-Paris, mais aussi les musiciens américains de passage. Il n’est pas rare d’y entendre les grands jazzmen de passage y boeuffer tard dans la nuit. Il y a la Boule Blanche, la Canne à Sucre, le bal de la rue Blomet…Il y a surtout La Cigale, la grande brasserie de Pigalle qui va brasser toutes les générations jusqu’à sa fermeture, le 28 Septembre 1975.Le wabap d’Al LirvatDu haut de ses 87 printemps, Al Lirvat se souvient de ses vertes années. Sa carrière est exemplaire, son style emblématique. Guitariste autodidacte, il déboule de sa guadeloupe en Décembre 1935. Il est déjà un bon musicien amateur, un compositeur en herbe, mais pas encore le visionnaire loué par tous. Plusieurs rencontres vont s’avérer décisives, à commencer par celle avec Félix Valvert : « Il m’a embauché dans son orchestre pour remplacer son tromboniste qui venait de mourir. Seulement, moi, j’étais guitariste ! J’ai donc tout appris à l’oreille, en travaillant les chorus de Jack Teagarden, JJ Johnson et JC Hingginbotham ». C’est ainsi qu’il se met au jazz américain, initié par son ami Charles Delaunay. Il est vite cité au plus haut dans les classements du Hot Club. Et là, deuxième révélation qui cette fois va révolutionner la biguine. « En février 1948, j’ai assisté comme tous ceux qui étaient curieux au concert de Dizzy avec Chano Pozzo à Pleyel. Bien entendu, dans ce déluge de notes, on n’y comprenais rien ! Mais quand j’ai commencé à piger, tout est devenu limpide. Et je me suis dit : pourquoi ne pas faire pareil avec la biguine ? » Il crée alors le wabap, c’est-à-dire les principes du cubop et du bebop appliqués à la biguine, qu’il modernise en intégrant des assonances et des dissonances, des accords altérés et des rythmes en cinq, six et sept temps. « Le nom m’a été soufflé par Nelly, une danseuse de la Canne à Sucre ». « Doudou pas pleuré » sera le titre phare qui marque une rupture avec la tradition des années 1950. Dès lors, il ne sera jamais plus tout à fait considéré comme un musicien de biguine ni comme un musicien de jazz par les puristes des deux côtés. Entre les deux, ce mélodiste raffiné était surtout en avance de cinquante ans ! Il suffit de se pencher sur ses quelques 250 compositions originales pour mesurer le talent de ce personnage qui, à la fin des années 1960 va encore inventer un nouveau rythme, le kalangué, bientôt suivi par le beka. « Deux temps after beat, deux temps biguine : la parfaite combinaison ! C’était aussi une danse, avec une cavalière et des pas bien précis ». Et de mimer sa danse sous les lambris de sa vaste demeure aux allures de palais habanero. « C’était chouette !». L’expression nous rappelle un autre « Antillais » revenu d’on ne sait où : Henri Salvador, lui aussi guitariste et fin mélodiste. En 2002, Al Lirvat vit toujours à Paris, il est encore absent des encyclopédies de jazz, au même titre que l’immense saxophoniste Robert Mavounzy.Le Tépaz de Ti MarcelÁ deux pas de chez lui, on retrouve un autre rescapé de la belle époque des mazurkas et biguines. Le saxophoniste martiniquais Ti Marcel, de son vrai nom Marcel Louis-Joseph, n’a « que » 72 ans. Lui aussi a débuté en autodidacte, « sur le pipeau de mon cousin », puis sur un biniou troqué contre un biclou. Ti Marcel découvre le jazz en gagnant à la loterie un Tépaz et un 75-78 tours de jazz. « Johnny Hodges, Coleman Hawkins et surtout Don Byas ». Il les rejoue note à note, tant et si bien que très vite on surnomme le jeune homme Don Byas. Le jour où il croise l’Américain aux Trois-Maillets, celui-ci l’invite à « se démarquer de son jeu ». Mais voilà, celui qui affirme avoir joué de tout, « du mambo, du paso doble, des boléros, des guarachas », a pour modèle les grands ténors américains de l’époque : Lester Young et Sonny Rollins, plus que Stellio et Sylvio Siobud…S’il a connu une carrière bien remplie, s’il a joué avec Quincy Jones début 60, Ti Marcel restera pour la mémoire un bon musicien de séance, n’ayant gravé qu’un disque sous son nom. Il ne regrette rien, bien au contraire. « Si j’étais resté au pays, je seraiplus connu, mais moins fort techniquement ». Et le retraité des affaires d’enchaîner quelques chorus chaloupés, du Rollins et une biguine. « Avec un solo de jazz, j’peux pas m’en empêcher ! ».La salsa du démon Guédon.Originaire de Fort-de-France et influencé par Sainte-Marie, « lieu mythique et mystique du bel air, l’équivalent du guaguanco cubain », le touche-à-tout Henri Guédon fut lui aussi un musicien attentif aux nouveaux courants venus des Etats-Unis. C’est ainsi qu’il créera très tôt la contesta, marquée par la musique latine, mais c’est endébarquant en France qu’il prend un temps d’avance sur son époque. Il participe aux prémices de la fusion du Chat qui Pêche avec Loe Maka et Tony Scott et au début des années 1970, de retour de New York, il s’illustre en créant un big band de jazz caraïbes aux fortes consonances salsa. « A Paris, nous avion plus de possibilités, les producteurs étaient plus ouverts », se souvient le quasi-sexagénaire assagi qui réalisa « les premières adaptations créoles de classiques cubains ». C’est à lui que l’on doit la vague zouk, « un mot tiré du créole qui désignait une pauvre paillote, un lieu de perdition qui accueillait toutes les fusions avec les tambours ». Aujourd’hui épuisés, « Cosmozouk » et « Zouk experience » sortirent sur CBS au milieu des années 70.Á écouter ces tourneries insensées, on mesure le contresens historique et esthétique qui va suivre, même si les premiers disques de Kassav, de Malavoi, sont loin d’être sans qualité. « Le zouk ne me gêne pas. Il y en a juste trop, et pas assez bon ». A l’époque, il enflamme L’escale, lieu de rendez-vous des danseurs et transeurs. Avec le recul, celui qui se considérait comme un franc-tireur, l’ami de Pierre Goldman, estime que « cette attitude a fait avancer les choses ». « Je me souviens que le public communautaire nous sifflait. Il nous fallait prendre le maquis ! Mais nous avons montré le chemin aux plus jeunes ». Depuis bientôt vingt ans, le percussioniste-compositeur s’est fait plus discret, favorisant une autre facette de son travail, les arts plastiques. Il n’en reste pas moins créatif, toujours prompt à se lancer dans l’aventure si tant est qu’on lui donne l’envie et la place. La réécoute attentive de disques comme « Afro Blue » et « Afro Temple » est un argument qui devrait achever de convaincre les plus sceptiques…Retour aux racinesSi la fermeture de la Cigale conclut la fin d’une ère, celle d’un jazz antillais aux couleurs de la biguine, c’est à la même époque que débarquent progressivement d’autres musiciens, cette fois plus soucieux de valoriser leurs origines africaines. L’heure n’est pas encore à la world, mais déjà à la « musique racine ». Le ka et la flûte en bambou peuvent enfin desczendre des mornes. Depuis les années 60, quelques maisons (Cellini, Emeraude, Mavounzy) publient des disques de cette musique de « mauvais garçons », mal considérée voire envisagée comme une tache sur les vestons bien propres et lisses de la bourgeoisie typique. « dans le miouvement d’assimilation, le ka était un symbole dérangeant. Pour moi, il est l’affirmation de notre identité », pointe Klod Kiavé, tambourinaire guadeloupéen arrivé en 1994 avec la dernière vague et coleader du groupe Wopso. Q’importe : les temps changent, l’heure est à l’indépendance et les tambours sont là pour rappeler de douloureux souvenirs. En la matière, quelques personalités vont vite s’illustrer : le flûtiste Max Cilla, les percussionistes Robert Loyson, Ti Raoul Grivalliers…Là encore, impossible de tous les citer tant le vivier est riche. Il en est deux pourtant que l’on ne peut passer sous silence : Eugène Mona et Marcel Lollia, plus connu sous le sobriquet de Vélo. Le premier est martiniquais, joue de la flûte et chante comme Fela. Le second est guadeloupéen et frappe les peaux aussi fort, aussi juste, qu’un Patato. L’un et l’autre incarnent l’âme noire qui renaît. La légende de l’un et le mythe de l’autre ne traverseront jamais tout l’océan. Vélo terminera dans le caniveau, Mona dans le quasi oubli. Et pourtant n’importe quel percussionniste antillais vous dira que Vélo était le meilleur marqueur, à la fois le plus ouvert et le plus conscient de ses racines. L’un comme l’autre ont réveillé les consciences. Leur spiritualité va irradier toutes les générations à venir à Paris. D’autant mieux qu’en métropole, l’heure est au free. Les héritiers de Césaire peuvent enfin sortir du ghetto, la musique bwa-bwa ou chouval-bwa raisonner de son plus bel écho. Et là encore, la parenté est évidente avec les musiques noires américaines. « Il existe un sentiment ka comme il existe un sentiment blues », résume Klod Kiavé. « Le boladieul, c'est-à-dire le tambour de bouche dans la musique ka, c’est du scat qui s’ignore », précise Roland Brival. […]Trois livres pour en savoir plus« Félix Valvert, le roi de la rumba » (Ed. New Legend), par Isabelle de Valvert. La biographie du saxophoniste et chef d’orchestre qui en forma plus d’un. Á noter la future parution dans la même collection d’un ouvrage consacré à Al Lirvat. « La Biguine de l’Oncle Ben’s » (Ed. Caribéennes), par Jean-Pierre Meunier et Brigitte Léardée. Avant de devenir le célèbre Oncle Ben’s, Ernest Léardée a traversé le siècle et l’océan pour imposer à Paris le son typique de la biguine.« Musiques & musiciens de la Guadeloupe », par Alex et Françoise Uri. Un ouvrage un peu ancien mais qui a l’intérêt de bien insister sur les racines de la musique antillaise.Jacques DENIS© VIBRATIONS
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La compagnie cévenoleLa biguine martiniquaise revit au pied des Cévennes, grâce à l'Antillais Gérard Tarquin et sa clique métissée qui ont fait d'Anduze un fief des tempos créoles.La biguine avait disparu sous le rouleau compresseur du zouk électrique. Voici ses danses guillerettes et facétieuses ressuscitées, non à Saint-Pierre, au sud de la montagne Pelée où elle est née, mais à Anduze, dans le Gard, au pied des Cévennes, où vit Gérard Tarquin, clarinettiste martiniquais au teint blême, hanté par ses racines nègres. Au sein du groupe Coeur de Chauffe - qui emprunte son nom au nectar de rhum -, il redonne vie aux alliages de tambours bel-air, de figures de carnaval et de mazurka européenne qui ont fait les beaux jours du Bal nègre de la rue Blomet, à Paris, au début du XXe siècle. Les amateurs de jazz New Orleans connaissent bien Tarquin, puisqu'il fut un des fondateurs du groupe Les Haricots rouges, dont le swing un brin désuet se taille un joli succès populaire depuis une quarantaine d'années. « Au fond, se défend-il, nous ne devons pas être si ringards que ça : je me souviens par exemple avoir fui un plateau télé pour aller faire le boeuf avec Sun Ra. D'ailleurs, lorsque dans notre dernier album nous avons adapté Angela, de Saïan Supa Crew, tout le monde a pensé que c'étaient les rappeurs qui s'étaient inspirés de nous et non l'inverse. La créolité de La Nouvelle-Orléans, ne l'oublions pas, est cousine des métissages antillais. » Le goût de Tarquin pour les jam-sessions et son sens de la famille hérité des fêtes martiniquaises de son enfance (dans le 13e arrondissement, à Paris) ont entraîné nombre de musiciens, jeunes ou moins jeunes, dans son sillage. « C'est un gourou », dit Lulu, le batteur des Têtes raides, qui a fait le boeuf avec lui il y a vingt ans, en Seine-et-Marne où tous deux habitaient, puis à Anduze où il est souvent venu le voir avant de décider, il y a trois mois, d'y jeter l'ancre. D'autres potes de l'époque du lycée Rodin à Paris, ou des débuts des Haricots rouges en Seine-et-Marne, ont fait à peu près le même parcours. La plupart d'entre eux se retrouvent dans le groupe Coeur de Chauffe pour sortir la biguine « du folklore distillé dans les musées que sont les maisons de la culture ». « C'est une musique qui parle aux gens et qui les fait bouger », s'emballe Tarquin. « C'est une musique gaie qui donne le goût de vivre », ajoute Joseph Zobel, 90 ans, auteur de La Rue Cases-Nègres, lui même installé à Anduze depuis 1976. Grâce à son fils Roland Zobel dit Zozo, potier et grand amateur de noubas antillaises, nombre de Parisiens, musiciens ou non, se sont pris de passion pour ce verdoyant petit coin du Gard connu pour ses camisards d'autrefois et ses inondations d'aujourd'hui. « Zozo et moi, on s'est trouvés dans la même situation, lui très noir, moi très blanc, aucun de nous deux n'ayant vécu aux Antilles, raconte Tarquin. C'est dans sa superbe maison en surplomb d'Anduze que peu de temps avant sa disparition, à 58 ans - en mars 2004 -, le disque Couleur cachée a été enregistré à haute dose de rhum, boudin, accras et colombo. » Cette bonne ambiance est palpable tout au long de ce CD aux saveurs rétro, où flotte l'esprit d'Eugène Delouche, illustre clarinettiste martiniquais qui fut le maître de Tarquin. Le piment poétique et gouailleur y est distillé par la chanteuse Maura Michalon, venue du lyrique, qui sait retrouver l'âpreté des biguines du « temps longtemps » (comme on dit en créole), et l'accordéoniste-vocaliste Roland Pierre-Charles, ex-membre de La Perfecta, groupe culte antillais des années 70, qui insuffle à l'ensemble une énergie goguenarde et rageuse aux frontières du rock. Tous les morceaux interprétés sont des grands classiques signés Ernest Léardée, Alexandre Stellio, Léona Gabriel, Al Lirvat, Loulou Boislaville... Sauf Couleur cachée, la chanson-titre écrite par Gérard Tarquin, qui laisse libre cours à son blues de « sang-mêlé » et à son goût du balancement chaloupé : « Biguine Saint-Pierre bien cadencée /Mon Dieu ce que j'en ai rêvé /C'est dans mon sang, c'est dans mon âme /Oui mais je suis né à Paname. »par Eliane Azoulay - Télérama n° 2916 - 30 novembre 2005, ffff
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Frémeaux & Associés est le premier éditeur sonore du patrimoine créole. La direction de la réédition de toute l’histoire de la musique antillaise a été confiée à M. Jean-Pierre Meunier, spécialiste de la musique et de l’histoire des Antilles.Ce travail a été honoré de l’ensemble des distinctions de la presse World Music, comme de la presse classique ou jazz. Frémeaux & Associés est particulièrement sensible aux nombreux courriers reçus depuis les Antilles de la part d’auditeurs heureux d’avoir pu retrouver la mémoire de leur histoire (biguine, valses & mazurkas créoles, naissance du zouk et du mambo…)
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"Pour Gérard Tarquin, la Martinique, où il aurait pu naître, et n’avait pas encore été, c’était avant tout la fantasmagorie, dont abreuvait son imagination la musique qu’avaient fait enregistrer, sur des disques devenus introuvables aujourd’hui, les premiers musiciens antillais, que l’Exposition Coloniale avait appelés en France, et que le succès retint à Paris jusqu’à la fin de leur vie ? Alexandre Stellio et Eugène Delouche. Une musique que l’adolescent qu’il était alors percevait comme un produit des amours libres de ces prestigieux musiciens avec la vie populaire aux Antilles. Et quelle n’était pas sa fierté de la faire entendre confidentiellement à ses camarades. Qu’il soit donc remercié d’avoir ainsi défendu de l’oubli une partie aussi authentique et précieuse de notre patrimoine. Ne faudrait-il pas d’abord féliciter ce groupe d’avoir fait preuve d’autant de talent que de respect envers des musiciens qu’ils considèrent comme leurs maîtres (Eugène Delouche a d’ailleurs été le professeur de Gérard Tarquin), et de fidélité à la physionomie d’une époque ? Ils trouveront certainement une entière et admirative approbation dans l’émotion et la joie avec lesquelles chacun, en écoutant ce disque, pourra se souvenir, chanter, danser." par Joseph ZOBEL (Auteur de « Rue Case-Nègre »)
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The subtitle of this release is « Biguines & Mazurkas Créoles Today », which is accurate – though not completely so. Many French Antillean bands include an occasional beguine or mazurka in their repertoire, performed in a modern fashion, but this is a little different: Coeur De Chauffe is a band under the leadership of Gérard Tarquin, clarinettist with famed French jazz band Les Haricots Rouges – who once opened for The Beatles. Gérard was born in Paris but his father was from Martinique and he grew up in a family with a strong Créole infrastructure. He long dreamed of making an album of the music of the islands, and this lovely – no other word for it – CD is the result. The production is modern but the music is timeless, drawing on the classic repertoire of Paris’s Caribbean club and dancehalls from the 20s to the 50s. A little akin to New Orleans jazz, the leader’s clarinet is steeped in the classic sound, which is hardly surprising as he was taught by Eugene Delouche, one of the pioneer recording artists, and he also handles the bulk of the vocals, though songstress Maura Michelon also makes a fine contribution, and fellow Antillean Roland Pierre-Charles ups the French sounding quotient with some accordion playing that recalls – more or less equally – French café society and Louisiana bayous. This is a bygone sound played with a vibrant and affectionate though not over reverent approach. As I said, lovely stuff.Norman Darwen – ROCK’N’REEL
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Cœur De Chauffe is a band under the leadership of Gérard Tarquin, clarinettist with the famed French jazz band, Les Haricots Rouges. M. Tarquin was born in Paris in 1943 and is of Créole ancestry, his father having moved to the French capital from Martinique in the French Antilles in 1930. He grew up in a Caribbean environment and was taught clarinet by Eugène Delouche, a veteran of Paris’s West Indian dances, who also encouraged Gérard’s pride in this heritage. At the beginning of the sixties, Tarquin began playing jazz – though with the style of Sidney Bechet as his first lesson, those Créole roots were never far away, and he would often introduce one or two biguines in the band’s sets. It was long his dream though to have a full band and an album of Martiniquan music, and that dream is brought to fruition with Coeur De Chauffe and this wonderful, flowing CD. The subtitle of this release is “Biguines & Mazurkas Créoles Today”, although both the mazurka and biguines can be found in the recordings of many modern French Caribbean outfits, they tend to be interpreted in a modern style. This too is a modern set, but it is only the quality of the production that betrays its contemporaneity. With the exception of the autobiographical title track, the material dates from the twenties (or before) to the fifties, some of it from the folk tradition, but the majority from leading names such as Stellio, Ernest Léardée, Léona Gabriel, Albert Lirvat and Gérard’s mentor, Eugène Delouche. There is a real vibrancy and sense of enthusiasm about the whole set but the latter’s “La Figuïe”, “Retour Au Pays” and “Shell X 100 Motor Oil” are outstanding, full of warmth and verve, with M. Tarquin seeming to want to ensure his old teacher would be proud of the pupil’s achievements. The accomplished and very authentic-sounding backing band consists of past and present members of Les Haricots Rouges, plus the Antilleans Roland Pierre-Charles (whose accordion style is midway between musette and zydeco) and female singer Maura Michelon, though it should be stated that Gérard himself handles the bulk of the vocals and shows himself to have a good voice for this kind of material. Plaudits are due too to the trombonist Denis Carterre and Norbert “Roro” Congrega on banjo. Surprisingly perhaps, this is no more jazz inflected than most beguine, and those lilting Caribbean roots are strong. Those with an appreciation of this Antillean tradition will find this CD a true delight. Norman DARWEN – BLUES & RYTHM MAGAZINE
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« Radicina, radix, radicis…Ca vient de loin tout ça. Radici, raices, roots, racines…Tout le monde en a. Les racines… Quand on a vingt ans, cela ne vous préoccupe guère. A quarante ans, on commence déjà à s’en inquiéter davantage : débats socio-politiques, pensées philosophiques. D’où viens-je, qui suis-je, où vais-je… et quand donc serai-je augmenté ? » Pierre LAFARGUE – JAZZ CLASSIQUE
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“« Bon sang ne saurait mentir » comme le confirme le clarinettiste Gérard Tarquin, animateur depuis plus de 40 ans des Haricots Rouges et qui consacre enfin un disque à la musique de ses ancêtres martiniquais. Gérard chante, en créole, des originaux (sa touchante composition Couleur cachée) et standards dont certains rendus célèbres par Al Lirvat, Léardée ou Stellio. Retour aux sources, devoir de mémoire, salut aux anciens, voici un disque superbe qu’attendait depuis longtemps le public des Haricots Rouges. Il comblera également les fervents de musiques traditionnelles et, par-dessus tout, les amoureux de clarinette, qui se régaleront de la sonorité volumineuse et chaleureuse du leader.” Jean-Pierre DAUBRESSE, JAZZ MAN
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Liste des titres
  • Piste
    Titre
    Artiste principal
    Auteur
    Durée
    Enregistré en
  • 1
    COULEUR CACHEE
    GERARD TARQUIN
    GERARD TARQUIN
    00:03:41
    2003
  • 2
    EDAMYSO
    GERARD TARQUIN
    ERNEST LEARDEE
    00:03:38
    2003
  • 3
    A SI PARE
    GERARD TARQUIN
    LEONA GABRIEL
    00:02:37
    2003
  • 4
    LA GUADELOUPEENNE
    GERARD TARQUIN
    ABEL BEAUREGARD
    00:04:32
    2003
  • 5
    YAYA MOIN NI L AGENT
    GERARD TARQUIN
    FOLKLORE
    00:03:34
    2003
  • 6
    OUE OUE (LA GREVE BARRE MOIN)
    GERARD TARQUIN
    LEONA GABRIEL
    00:04:16
    2003
  • 7
    MABILLAGE DECOLLAGE
    GERARD TARQUIN
    LEONA GABRIEL
    00:03:18
    2003
  • 8
    BOSSU A
    GERARD TARQUIN
    FOLKLORE
    00:03:17
    2003
  • 9
    FEMME MARTINIQUE DOU
    GERARD TARQUIN
    CHARLES DENIS FRANTZ
    00:02:57
    2003
  • 10
    LA FIGUIE
    GERARD TARQUIN
    E DELOUCHE
    00:02:30
    2003
  • 11
    AN LAVALLIE FLEURI
    GERARD TARQUIN
    COPPET HURARD
    00:04:13
    2003
  • 12
    MOIN DESCENN SAINT PIERRE
    GERARD TARQUIN
    FOLKLORE
    00:03:16
    2003
  • 13
    RETOUR AU PAYS
    GERARD TARQUIN
    E DELOUCHE
    00:03:25
    2003
  • 14
    LA RUE ZABYME
    GERARD TARQUIN
    FOLKLORE
    00:03:25
    2003
  • 15
    SHELL X 100 MOTOR OIL
    GERARD TARQUIN
    LOUIS BOISLAVILLE
    00:02:05
    2003
  • 16
    LA SIRENE
    GERARD TARQUIN
    LOUIS BOISLAVILLE
    00:04:08
    2003
Livret

CŒUR DE CHAUFFE couleur cachée FA 477

CŒUR DE CHAUFFE
“couleur cachée”  
Gérard Tarquin

Biguines & Mazurkas
Créoles
Today


Cet album est dédié à Roland Zobel dit “Zozo” décédé le 28 mars 2004.

Le groupe “Cœur de Chauffe” est composé de :
Gérard Tarquin (clarinette, vocal dans 1, 6, 12, 13, 15)
Denis Carterre (trombone)
Norbert “Roro” Congrega (banjo)
Roland Pierre-Charles (accordéon, piano dans 16, vocal dans 2, 7, 11)
Pierre Jean (piano, sauf 16)
Alain Huguet (contrebasse)
Michel Senamaud (batterie)
Fifi Naeder et Pipou Couret (percussions)
Maura Michalon (vocal dans 3, 8, 14)
Valentine, Julia, Charlotte, Marion, Adrien (chœurs)
Marie (catering)
Contact : tarquin.gerard@wanadoo.fr
Enregistrement réalisé à Anduze en juillet 2003.
Prise de son, mixage et mastering : Thierry Grimbard (Polystudio, Saint-Pierre-sur-Vence).
Photo de couverture : Mémé Laurence (photo de famille)

COULEUR CACHÉE

Stellio, Delouche et les Coppet… tout est dit. Voici un disque qui honore la clarinette créole, la vraie, l’authentique : celle qui ravissait les habitués du Bal Blomet dans les années cinquante, celle qui, bien avant cela, déclencha la révolution dans les dancings parisiens des années trente en y faisant connaître la biguine des lointaines Antilles. Mais qu’on ne s’y trompe pas. Les musiciens ne sont pas réunis, par volonté passéiste, pour une cérémonie du souvenir dans le but d’exhumer des fantômes. Non. C’est une clarinette bien actuelle, bien vivante, remplie de fougue, d’énergie et de fraîcheur, avec sa personnalité originale, qui nous est livrée ici. On en est convaincu dès les premières notes.L’âme du CD et du groupe “Cœur de Chauffe” est le clarinettiste de souche martiniquaise Gérard Tarquin. Ce n’est pas un inconnu. Tous ceux qui étaient adolescents dans les années soixante ont encore en tête cet orchestre de lycéens un peu fous qui enchanta leur jeunesse en relançant en France, en pleine vague yéyé, la musique de la Nouvelle-Orléans. Vous avez deviné : il s’agit de l’orchestre des Haricots Rouges, qui vient d’ailleurs de fêter son quarantième anniversaire. Gérard Tarquin, rempli de toute sa passion pour la musique créole, en est un des fondateurs et le seul à avoir accompagné le groupe sans discontinuer depuis sa création.
Gérard Tarquin est né en 1943 à Paris. Son papa Albert avait débarqué de la Martinique en 1930 à l’âge de quatorze ans, accompagné de sa maman Laurence et de ses quatre frères et soeur. Quand viennent les vacances scolaires, le jeune Gérard retrouve ses cousins et cousines chez sa grand-mère. Pour faire tenir tout ce petit monde tranquille, elle leur raconte des histoires terrifiantes de soucougnans, zombis, gagés, dorliss, gadé zaffè, chouval trois pattes… Les parents et amis sont nombreux et les occasions festives ne manquent pas où l’on se raconte en créole les dernières nouvelles de la communauté. Tout cela pour dire que Gérard a baigné depuis l’enfance dans le chaudron antillais : acras, boudin, féroce, crabe farci, pâté en pot, queue de cochon, dombrés, haricots rouges, colombo et tout le reste… sans oublier la biguine et le parfum subtil du ti-punch citron vert qui se diffusait autour de lui. Et l’on dansait au son des disques de Stellio, Delouche, Castendet, Alphonso… souvenirs qui s’incrustent et façonnent de manière indélébile l’oreille et la sensibilité musicale du petit garçon. Une première expérience malheureuse vers l’âge de sept ou huit ans avec une dame acariâtre qui lui apprend le piano en lui tapant sur les doigts, et le voilà dégoûté pour plusieurs années de tout apprentissage musical.
Enfin, vers quatorze ou quinze ans, se produit le déclic qui va changer la vie de Gérard. Papa Tarquin est un vieil ami du clarinettiste Eugène Delouche, natif comme lui de la commune du Marigot, qu’il a connu dans les années trente en fréquentant les bals antillais de Paris. Eugène Delouche, devenu chauffeur de taxi, apporte un jour à la maison la collection complète de ses disques Ritmo, la marque de 78 tours qu’il avait fondée de toutes pièces en 1951 pour promouvoir sa propre musique. L’électrophone familial se met à diffuser une musique sublime, une kyrielle de biguines, valses et mazurkas créoles interprétées par le maestro de la clarinette. L’adolescent est ébloui. Sa décision est prise, il jouera de la clarinette. Bien évidemment, les parents ne sont pas d’accord. Mais au bout de plusieurs mois, à force d’insistance, Gérard réussit à persuader son père de lui acheter une clarinette et de lui offrir des cours. Le professeur est tout désigné puisque l’un des meilleurs est un ami de la famille. Eugène Delouche refusera d’être payé et ira en personne chez Selmer choisir l’instrument de son élève – celui-là même qu’il utilise encore aujourd’hui – une clarinette d’occasion, l’un des premiers modèles système Boehm d’une sonorité particulièrement brillante. Deux fois par semaine durant trois ans, Gérard fera par le métro le trajet des Gobelins jusqu’au domicile de son professeur à Saint-Ouen pour y recevoir ses premiers rudiments de clarinette et de jazz, en commençant par Sidney Bechet. Non seulement Delouche lui apprend la technique et les subtilités de l’instrument, mais il lui parle beaucoup : de la Martinique, de son passé de musicien, des gens qu’il a connus, des aventures qui lui sont arrivées… et Gérard boit ses paroles comme un divin nectar.
Nous sommes en 1960. Gérard Tarquin a dix-sept ans et il est élève de 1ère au Lycée Rodin, rue Corvisart dans le 13ème arrondissement de Paris. Le proviseur, très en avance sur son époque, encourage les arts dans son établissement et institue une quarantaine de clubs d’expression dans toutes sortes de disciplines. Tout naturellement, Gérard fait partie du club de jazz où il retrouve un copain de 5ème quand il était au lycée Henri IV, le pianiste Pierre Jean. Les lycéens ont à leur disposition une salle de répétition avec un piano, et ils donnent leurs premiers concerts de jazz dans le style de la Nouvelle-Orléans. Un joueur de washboard, Gilbert Leroux, se joint à eux. Un soir de 1961, ils participent à un challenge de jeunes sur la légendaire scène circulaire du Concert Pacra, boulevard Beaumarchais, où chantait Aristide Bruant en 1875. C’est un triomphe. Tous les copains du Lycée Rodin sont venus les applaudir, dans une ambiance d’enfer. Le directeur artistique de la maison Pathé Marconi se trouve par hasard dans la salle. Il laisse sa carte de visite et demande aux musiciens de passer le voir pour une audition. C’est le début de la fabuleuse carrière des Haricots Rouges, l’enchaînement des disques et des concerts. Le groupe, chouchouté par Bruno Coquatrix, sera plusieurs fois à l’affiche de l’Olympia : avec Barbara, Brel, Brassens, Trini Lopez, Sylvie Vartan, Adamo, les Rolling Stones… ainsi qu’au Palais des Sports en première partie des Beatles et de Louis Armstrong. Gérard Tarquin, fidèle à ses amours créoles, ne manque jamais d’inclure au programme une ou deux biguines. Mieux : il invite de grands musiciens antillais à se joindre à eux. Eugène Delouche, Albert Lirvat, José Benjamin, Georges Nouel,  les frères Misaine, Bibi Louison, Don Barreto, Jean-Pierre Coco… joueront avec le groupe lors de plusieurs concerts. En 1986, les Haricots Rouges font une tournée aux Antilles.
En novembre 1988, Bernard Bolosier, directeur de la Maison de la Culture du Lamentin, invite Gérard Tarquin au Festival de Clarinette de la Martinique présenté cette année-là par Gilles Sala. Dans son répertoire de musique traditionnelle, Gérard est ovationné par la salle et Honoré Coppet l’embrasse en lui disant « Dans mes bras, mon fils ! ». Mais c’est aussi pour lui un examen de passage devant un public antillais et le plus gros trac de sa vie.Et l’histoire se poursuit jusqu’à aujourd’hui, avec une escale antillaise dans le Gard qui mérite d’être racontée. Le trompettiste des Haricots Rouges de l’époque avait étudié les Beaux-Arts à Bourges avec un copain martiniquais nommé Roland Zobel, installé comme potier à Anduze, tout près d’Alès. Son père Joseph Zobel, écrivain, n’est autre que l’auteur du célèbre roman “La rue Cases Nègres” dont Euzhan Palcy a tiré un film (Lion d’Argent à Venise en 1983). Voici de cela trente ans, les Haricots Rouges passent dans la région et font le détour pour saluer Roland, dit “Zozo”. Ce dernier, particulièrement sympathique, bon vivant et doué d’un sens peu commun de l’hospitalité, organise une fête antillaise, puis une autre… si bien que le séjour se prolonge au delà de ce qui était prévu. Rebelote l’année suivante, mais le séjour dure encore plus longtemps. Beaucoup d’antillais vivent dans les environs et ont coutume de se retrouver chez Roland Zobel. La région est magnifique. C’est le coup de foudre. Gérard Tarquin s’achète un pied-à-terre, revient chaque année, puis décide il y a vingt ans de s’installer définitivement à Anduze avec sa famille, imité par d’autres membres des Haricots Rouges. La maison de Zozo est le point d’attraction d’un vaste cercle d’amis des environs et d’ailleurs où se cultive un art de vivre à la créole entretenu par la convivialité, les échanges, la musique, la cuisine, l’esprit de fête…
C’est chez Roland Zobel et sa femme Zizou que Gérard rencontre les musiciens antillais qui complèteront le groupe “Cœur de Chauffe”. Le pianiste marti­niquais Roland Pierre-Charles a un cursus bien rempli dans la musique antil­laise. Ancien membre de l’orchestre “La Perfecta”, il a tourné avec des orchestres latino-américains avant de devenir un musicien de studio recherché. Dans ce disque, on l’entend surtout à l’accordéon et il y excelle dans un style biguine issu du plus profond terroir martiniquais. Et quand, avec fausse nonchalance, il chante les paroles de sa voix goguenarde et râpeuse, c’est tout l’esprit frondeur du vieux Saint-Pierre qui renaît avec lui. Maura Michalon, chanteuse lyrique, professeure au Conservatoire de Musique de Paris, interprète avec fraîcheur, spontanéité et ironie les succès populaires de son enfance à la Martinique. C’est un bonheur de les entendre avec une jeunesse renouvelée. Les autres musiciens, anciens ou actuels des Haricots Rouges, ont assimilé avec une étonnante maestria les ficelles de la biguine au point qu’il serait bien difficile de faire la différence d’avec des Antillais pur-sang. Le tromboniste Denis Carterre est le beau-frère de Gérard Tarquin – une affaire de famille en quelque sorte – et l’on est émerveillé de l’aisance avec laquelle il recrée la manière d’Al Lirvat, son maître à penser, dans la sonorité, l’enchaînement des chorus ou le discours contrapuntique.
Roro Congrega au banjo – instrument jadis omniprésent dans les orchestres de biguine mais aujourd’hui tombé en désuétude – sait donner la touche discrète mais indispensable qui fait office de liant et complète la couleur de l’ensemble. Pierre Jean, le pianiste, est avec Gérard co-fondateur des Haricots Rouges. La biguine fait partie de sa respiration. Il en possède le swing chaloupé, équilibre instable et toujours remis en question entre une main gauche et une main droite qui se défient, se cherchent et ne se rejoignent jamais. Michel Senamaud le batteur et Alain Huguet le bassiste sont depuis trente ans, rompus aux subtilités de la biguine. Michel Senamaud a joué avec Delouche, il a côtoyé les batteurs antillais et recueilli auprès d’eux des conseils et des trucs qui lui font posséder cette pulsion magique sur laquelle bien des batteurs européens se sont cassés les dents. Les jeunes percussionnistes Fifi Naeder et Pipou Couret ont adhéré depuis le début au projet “Cœur de Chauffe” et ils sont tout autant passionnés de rythmes antillais. C’est Fifi Naeder qui prend le frénétique solo de tumba dans “Edamyso”, soutenu avec vigueur par son complice Michel Senamaud. Enfin, comme nous le disions en introduction, l’esprit du groupe est insufflé par la clarinette de Gérard Tarquin. Quelle énergie, quelle vibration, quelle séduction !
C’est tout le feu de l’âme créole qui ressort à travers elle. La bi­guine, comme le jazz, est une musique qui vient du cœur et qui s’adresse au cœur. C’est un art direct, naturel, spontané qui ne s’embarrasse d’aucun arti­fice, d’aucune science, d’aucun académisme ni d’aucune arrière-pensée mercan­tile, n’en déplaise aux esprits tortueux et chagrins. C’est l’instinct premier qui parle. Nous sommes à la pleine source du processus d’expression et de création qui s’épanouissait à Saint-Pierre dès 1860 ou 1870, phénomène pareil à celui qui se développa aussi, mais trente ou quarante ans plus tard, dans les quartiers chauds de la Nouvelle-Orléans pour donner naissance au ragtime et au jazz. Mêmes causes, mêmes effets. Le résultat est là : ce son de clarinette créole unique, enthousiaste, sincère, convaincant, cette ardeur communicative et toujours renouvelée qui vous prend aux tripes, vous emporte et vous fait tout oublier. Oui, nous sommes en 2005, n’en doutez pas ! Quoi qu’on veuille nous imposer, nombreux encore sont ceux qui, tournant le dos aux musiques commerciales, synthétiques, insipides, frelatées, inhumaines, rabâchées par certains médias, aiment et comprennent les musiques généreuses et sensibles qui vont droit au cœur.
C’était le rêve de Gérard Tarquin, entouré de ses amis, d’accomplir ce retour aux sources, de retrouver et de brandir ses racines antillaises en un salut intime et puissant à ses aïeux, à cette hérédité musicale qu’ils lui ont transmise au plus profond des gènes. Une façon aussi de passer le flambeau et de rendre hommage à son maître Eugène Delouche qui fut le révélateur de cette richesse. C’est ce qui a guidé le choix des titres de l’album : compositions de Delouche (La Figuïe, Retour au Pays, Shell X100) ; airs d’avant la catastrophe de Saint-Pierre (Yaya, Bossu a, Moin descenn’ Saint-Pierre) ; grands classiques des années 1920 de Léardée, Stellio, Léona Gabriel ; succès d’après-guerre de Beauregard et Lirvat, Hurard Coppet, Loulou Boislaville, Francisco… le tout couronné de cette composition de Gérard : “Couleur cachée”, pathétique cri du coeur exprimant tout à la fois la nostalgie d’une époque héroïque, les interrogations du métissage et la difficulté quasi insoluble, propre à l’enfant issu de l’émigration, de s’insérer dans la culture du pays natal en ne perdant rien de celle de la terre de ses parents.
Jean-Pierre MEUNIER
© 2005 FRÉMEAUX & ASSOCIÉS / GROUPE FREMEAUX COLOMBINI SAS
english notes
Here is an album which gives tribute to the Creole clarinet, the true one, that which ran riot in the Parisian dance halls in the thirties, bringing the beguine from the distant French West Indies, that which enraptured the patrons of the Bal Nègre until the fifties.  However, the clarinet we find here is still thriving, vivacious, energetic and fresh.  As we discover in the opening notes.The nucleus of this CD and the group ‘Coeur de Chauffe’ is Gérard Tarquin, of Martinique origin.  He is far from being unknown.  He is the mainstay of the celebrated ‘Haricots Rouges’, which has recently celebrated its fortieth birthday.  Gérard Tarquin was born in Paris in 1943.  His father came over from Martinique in 1930 at the age of fourteen.  Throughout his childhood, as a member of a large family which had emigrated to Paris, Gérard bathed in West Indian culture – festive get-togethers, Creole tales, spicy dishes, rum and music.  And they danced the beguine and mazurka listening to 78’s of Stellio, Delouche, Castendet, Alphonso, etc.  Gérard’s father was an old friend of the noted Martinique clarinettist Eugène Delouche who he had befriended in the twenties in Paris’ West Indian dances.  At the age of fourteen Gérard was stupefied by his music and only wanted to play the clarinet taught by Eugène Delouche.  Finally his father accepted.  Delouche accompanied Gérard to choose his instrument and gave him his first lessons, starting with Sidney Bechet. 
Not only did Delouche show him the Clarinet’s technique and nuances, but also handed over his love for Creole music by speaking of Martinique and his past experience as a musician.In 1960 Gérard Tarquin was seventeen and was finishing his studies in the Lycée Rodin in Paris.  The headmaster, ahead of his time, set up some forty artistic clubs, covering a variety of activities, in the school.  Of course, Gérard joined the jazz club.  As a member of the school band, he gave his first concerts, adopting a New Orleans style.  One night in 1961, the young artists triumphed in the legendary circular stage in the Concert Pacra in Paris.  As it happened, the artistic director working for Pathé Marconi was among the punters, and invited the boys for an audition.  This was the debut of the ‘Haricots Rouges’’ fabulous career, with the discs and concerts which ensued.  The group was billed at the Olympia on several occasions and opened concerts given by the Beatles and Louis Armstrong in Paris’ Palais des Sports.And the story continued for forty years running.  Gérard Tarquin now lives in the south of France in Anduze, close to Alès.  He has befriended a potter named Roland Zobel, the son the celebrated Martinique writer Joseph Zobel, author of ‘La rue Cases Nègres’ (‘Black Shack Alley’) which was adapted for the silver screen by Euzhan Palcy (awarded the Silver Lion in Venice in 1983).  Many West Indians live nearby and often get together at Roland’s place where reigns a Creole style of living, boasting conviviality, exchange, music, cooking and a festive ambiance. 
It was at Roland and his wife Zizou Zobel’s home where Gérard met the West Indian musicians who made up the group ‘Coeur de Chauffe’.  The Martinique accordionist and pianist Roland Pierre-Charles is an ex-member of the band ‘La Perfecta’.  Maura Michalon, also from Martinique, a lyric singer and teacher at the Paris Music Academy, puts aside her classical repertory to interpret Creole songs from her childhood.  But every single musician has assimilated with astonishing mastery the workings of the beguine, to a point where it would be a hard task to tell the difference between their playing and pure-blooded West Indians.Gérard Tarquin had a dream – to make an album with his friends which would be entirely dedicated to music from the West Indies, his parents’ homeland.  This dream has come true.  The blaze of the Creole spirit pours out through Gérard’s clarinet.  Such energy, vibration and seduction!  You will be transported by the expressive and forever regenerated fervour, making you forget all else.  The titles were selected in homage to the musicians who popularised the beguine in France:  compositions by Eugène Delouche, tunes from before the Saint Pierre disaster, great classics of the twenties, post-war West Indian hits – crowned by one of Gérard’s composition:  “Couleur cachée”, a moving and heartfelt piece expressing the nostalgia of heroic days past, the difficulties surrounding half-castes, children born after emigration, as they have to adapt to the culture of where they live while still retaining that of their parents’ homeland.
English adaptation by Laure WRIGHT
from the French text of Jean-Pierre MEUNIER
© 2005 FRÉMEAUX & ASSOCIÉS / GROUPE FREMEAUX COLOMBINI SAS
CD Coeur de Chauffe "couleur cachée" © Frémeaux & Associés (frémeaux, frémaux, frémau, frémaud, frémault, frémo, frémont, fermeaux, fremeaux, fremaux, fremau, fremaud, fremault, fremo, fremont, CD audio, 78 tours, disques anciens, CD à acheter, écouter des vieux enregistrements, albums, rééditions, anthologies ou intégrales sont disponibles sous forme de CD et par téléchargement.)

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