« Des raretés et des petits bijoux » par Écouter Voir

Pour cet hommage, Radio France a fait coïncider la sortie du coffret (début février 2000) avec la date anniversaire de Prévert né le 4 février 1900. Voilà un auteur pour lequel les documents ne manquent pas, ceux qu’on entend ici viennent des horizons les plus divers : de l’INA et de nombreux éditeurs de disques. Notons que la partie Prévert scénariste est presque complètement occultée, peut-être parce qu’il fallait bien se limiter et faire des choix face à un sujet aussi vaste. Le côté fourre-tout que peut avoir une compilation de documents a été évité par un regroupement par thème : CD1 l’enfance, CD 2 l’amour, CD 3 la musique, CD 4 la liberté et l’anticléricalisme. Il ya beaucoup de choses et un peu de tout, mais tout n’est pas d’égal intérêt (était-il bien nécessaire de donner autant de place aux feuilles mortes ?). On passe de l’hommage conventionnel de circonstance au document qui rend vraiment vie à la statue. Plus on avance dans l’écoute, plus on trouve que le plus mauvais serviteur de Prévert c’est…Prévert lui-même. Soit qu’il ait eu peur d’improviser devant le micro, soit qu’il ait été d’une timidité maladive en public, on a vraiment l’impression que toutes ses interventions ont été préalablement écrites, ce qui déjà enlève du naturel mais c’est en outre un très mauvais orateur, son débit est toujours précipité, inexpressif et d’une monotonie plutôt ennuyeuse. Quand on l’entend ici, on a peine à croire qu’il ait pu être un écrivain aussi percutant. Son hommage au musicien Maurice Jaubert fait penser à ces oraisons funèbres prononcées au cimetière, qu’on accélère parce que la pluie commence à tomber, que le vent est glacial et que tout le monde est pressé de partir à commencer par le chargé d’éloge. Fort heureusement, il y a là aussi de meilleurs ambassadeurs de la cause : Cora Vaucaire, Michel Rachline, Juliette Gréco, François Chaumette, Maurice Baquet, qui, eux, savent nous parler de façon bien plus vivante, bien plus convaincante. Parmi les nombreuses chansons qu’on entend, il faut en citer trois qui sont des raretés et des petits bijoux : Cris du cœur par Catherine sauvage, La chasse à l’enfant par Marianne Oswald et le bouleversant Déjeuner du matin par la grande Marlene Dietrich. Le dernier CD (la liberté et l’anticléricalisme) est le plus réussi dans sa totalité. On retrouve u Prévert caustique, mordant, très drôle, grâce notamment au témoignage de Maurice Baquet dont le rire est communicatif. Cette anthologie se termine avec le sourire…enfin ! Malgré les quelques réserves formulées ci-dessus, on peut penser que cette réalisation sert finalement celle à qui elle veut rendre hommage.
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