« Le Jazz était déjà une musique sérieuse analysée par des intellectuels, mais encore une musique populaire sur laquelle les gens dansaient. A son tour, le quartette du pianiste Dave Brubeck allait enflammer – et donc diviser- la critique et faire twister les étudiants du monde entier avec un 45t comme on n’en fait plus, Take Five, extrait de « Times Out », l’un des albums les plus vendus de l’histoire du jazz. « Je souhaitais faire un album expérimental avec des signatures rythmiques inhabituelles en jazz. Lorsqu’on fait de longues promenades à cheval et qu’il adopte une allure régulière, le bruit des sabots qui frappent le sol vous inspire des rythmes. » Généralement dès qu’il s’agit de vendre des disques, l’expérimental ne rime guère souvent avec commercial, et encre moins avec cheval. Mais Brubeck avait misé sur le bon canasson, même si les grands manitous de la Columbia – à l’exception du big boss Goddard Lieberson - n’avaient, d’emblée, pas aimé le disque. Mais grâce à deux disc-jockeys – l’un de Cleveland, l’autre de Chicago- au goût plus sûr, Take Five devient donc un tube énorme, interprété par un groupe, où personne ne tirait la couverture à lui , ni le leader (Brubeck n’est de toute façon pas un grand improvisateur), ni le génial saxophoniste Paul Desmond ( et sa sonorité douce-amère reconnaissable entre mille), ni le contrebassiste Eugene Wright ( bien trop occupé à cimenter la musique), ni le batteur virtuose Joe Morelle ( qui a influencé les meilleurs batteurs anglais élevés au biberon jazz, de John Bonham à Bill Bruford en passant par Ian Paice. « Time Out » est au jazz ce que « Sgt. Pepper’s Lonely Heart Club Band » est à la pop ou « What’s Going On » à la soul : un disque que l’on croit connaître par cœur mais que l’on n’a jamais fini de (re)découvrir. Bref, un vrai disque culte. Inclus aussi les tubes Blue Rondo A La Turk et Three To Get Ready. »
Par Frédéric Goaty — MUZIQ
Par Frédéric Goaty — MUZIQ