"Le troisième volume, triple, de l’Intégrale Charlie Parker, est de la même veine que les précédents, c’est-à-dire frisant la perfection. Car l’entreprise est très périlleuse, voire impossible. On connaît en effet le souci de perfection qui habitait ce génie du sax et son inventivité prodigieuse. D’où des multiplicités de prises, toutes différentes les unes des autres, et un style en constante évolution.
Le premier CD contient par exemple trois versions de Moose the Mooche, deux de Yardbird Suite, trois d’Ornithology et trois de Night in Tunisia, dont le célébrissime break d’alto de quarante-sept secondes, enregistré et conservé tant il est stupéfiant et dont Charlie lui-même déclarait qu’il n’était pas certain de pouvoir le rejouer. On connaît l’histoire. En quatrième morceau, « Night in Tunisia » de Gillespie est proposé, et au premier break, Charlie Parker déboule, double, triple et quadruple les notes des quatre mesures du break, si bien que toute la rythmique est incapable de compter et se plante. C’est Miles Davis qui, se postant à l’écoute, et abaissant le bras au début de la cinquième mesure, donnera le signal pour que la section rythmique, piano compris (et c’est pourtant Dodo Marmarosa qui le tient), reste en place. Mais l’improvisation de Charlie Parker était tellement époustouflante qu’on l’a gardée. Sur ce CD, Charlie Parker joue également dans Jazz at the Philharmonic, avec – on salue bien bas - Buck Clayton (tp), Willie Smith (as), Lester Young (ts), Coleman Hawkins (ts) Buddy Rich (dm). Une autre fois, toujours dans le cadre JATP, mais pour la radio (ah, les programmes de ce temps-là), il joue avec Benny Carter (as) et Nat King Cole (p). Sublime !
Sur le disque 2, le voici avec Howard McGhee (tp) mais, à moitié malade (manque d’héroïne), il n’enregistre que quatre pistes, mais, parmi elles, « Lover Man », celle qui donne son titre à l’album, tragique à l’excès, car on sent presque physiquement sa souffrance et son angoisse. On le retrouve, après une cure de désintoxication à Camarillo, cette fois en pleine forme, en quartet avec Russ Freeman (p), jouant chez un ami des fragments qui ont déjà été publiés par Dial. Ainsi que deux titres, tirés d’enregistrements privés que, je l’avoue, je ne connaissais pas (un « Yardbird Suite » et un « Blues » trouvés derrière les fagots, d’écoute difficile, mais intéressante). Le CD se termine par deux prises de « This Is Always » et quatre de « Dark Shadows », avec Erroll Garner au piano, Red Callender (b), Doc West (dm) et, hélas, un crooner. Mais il y a également, le crooner étant parti, trois versions de « Bird’s Nest » et quatre de « Cool Blues », où l’on voit à l’œuvre le perfectionnisme de Charlie Parker. La dernière est parfaite. (Attention, sur le livret, des erreurs de numéros, sans trop d’importance).
Sur le troisième CD, d’abord, douze prises de quatre titres par les New Stars de Charlie Parker. Des New Stars qui méritent leur nom : Howard McGhee (tp), Charlie Parker (as), Wardell Gray (ts), Dodo Marmarosa (p), Barney Kessel (g), Red Callender (b) et Don Lamond (dm). Une formation en or massif et des titres aussi (“Relaxin’ at Camarillo”, “Cheers”). Puis le dernier enregistrement côte ouest de Bird, « Dee Dee Dance », dans un club, assez inaudible. Enfin c’est le Charlie Parker’s All Stars (ne pas confondre), soit de nouveau l’indispensable Miles Davis (tp), écrasé un peu par le maître, Bud Powell (p), qui doit supporter le mauvais caractère de Charlie, Tommy Potter (b) et Max Roach. C’est-à-dire un combo étincelant pour jouer des merveilles (« Donna Lee » ou « Chasing the Bird ») mais au prix d’un Charlie Parker pas toujours facile à vivre. Vivement le tome 4.
par Michel BEDIN - ON-MAG
Le premier CD contient par exemple trois versions de Moose the Mooche, deux de Yardbird Suite, trois d’Ornithology et trois de Night in Tunisia, dont le célébrissime break d’alto de quarante-sept secondes, enregistré et conservé tant il est stupéfiant et dont Charlie lui-même déclarait qu’il n’était pas certain de pouvoir le rejouer. On connaît l’histoire. En quatrième morceau, « Night in Tunisia » de Gillespie est proposé, et au premier break, Charlie Parker déboule, double, triple et quadruple les notes des quatre mesures du break, si bien que toute la rythmique est incapable de compter et se plante. C’est Miles Davis qui, se postant à l’écoute, et abaissant le bras au début de la cinquième mesure, donnera le signal pour que la section rythmique, piano compris (et c’est pourtant Dodo Marmarosa qui le tient), reste en place. Mais l’improvisation de Charlie Parker était tellement époustouflante qu’on l’a gardée. Sur ce CD, Charlie Parker joue également dans Jazz at the Philharmonic, avec – on salue bien bas - Buck Clayton (tp), Willie Smith (as), Lester Young (ts), Coleman Hawkins (ts) Buddy Rich (dm). Une autre fois, toujours dans le cadre JATP, mais pour la radio (ah, les programmes de ce temps-là), il joue avec Benny Carter (as) et Nat King Cole (p). Sublime !
Sur le disque 2, le voici avec Howard McGhee (tp) mais, à moitié malade (manque d’héroïne), il n’enregistre que quatre pistes, mais, parmi elles, « Lover Man », celle qui donne son titre à l’album, tragique à l’excès, car on sent presque physiquement sa souffrance et son angoisse. On le retrouve, après une cure de désintoxication à Camarillo, cette fois en pleine forme, en quartet avec Russ Freeman (p), jouant chez un ami des fragments qui ont déjà été publiés par Dial. Ainsi que deux titres, tirés d’enregistrements privés que, je l’avoue, je ne connaissais pas (un « Yardbird Suite » et un « Blues » trouvés derrière les fagots, d’écoute difficile, mais intéressante). Le CD se termine par deux prises de « This Is Always » et quatre de « Dark Shadows », avec Erroll Garner au piano, Red Callender (b), Doc West (dm) et, hélas, un crooner. Mais il y a également, le crooner étant parti, trois versions de « Bird’s Nest » et quatre de « Cool Blues », où l’on voit à l’œuvre le perfectionnisme de Charlie Parker. La dernière est parfaite. (Attention, sur le livret, des erreurs de numéros, sans trop d’importance).
Sur le troisième CD, d’abord, douze prises de quatre titres par les New Stars de Charlie Parker. Des New Stars qui méritent leur nom : Howard McGhee (tp), Charlie Parker (as), Wardell Gray (ts), Dodo Marmarosa (p), Barney Kessel (g), Red Callender (b) et Don Lamond (dm). Une formation en or massif et des titres aussi (“Relaxin’ at Camarillo”, “Cheers”). Puis le dernier enregistrement côte ouest de Bird, « Dee Dee Dance », dans un club, assez inaudible. Enfin c’est le Charlie Parker’s All Stars (ne pas confondre), soit de nouveau l’indispensable Miles Davis (tp), écrasé un peu par le maître, Bud Powell (p), qui doit supporter le mauvais caractère de Charlie, Tommy Potter (b) et Max Roach. C’est-à-dire un combo étincelant pour jouer des merveilles (« Donna Lee » ou « Chasing the Bird ») mais au prix d’un Charlie Parker pas toujours facile à vivre. Vivement le tome 4.
par Michel BEDIN - ON-MAG