Frémeaux nous propose une évocation (comme toujours remarquablement documentée) de l’esclavage dans la musique afro-américaine. Elle se présente en 3 CD (66 titres) qui constituent autant de chapitres distincts : « Slavery », « Songs of Freedom » et « Racial Segragation & Modern Slavery ». Si l’actuel territoire des Etats-Unis a vu débarquer beaucoup d’esclaves venus d’Afrique, une partie a essaimé sur la côte sud-américaine (au Brésil) et aux Antilles. Il est donc également question ici de traditions musicales d’Haïti, de Trinidad et Tobago, de Cuba, de Jamaïque, de Guadeloupe… En termes de musique, le premier CD considère des œuvres africaines souvent basées sur des chants et des percussions, des danses traditionnelles, de magnifiques works songs immortalisés par Alan Lomax en milieu pénitentiaire, un peu de jazz et de blues. Sur le deuxième CD, on retrouve ces styles avec une représentation accrue des spirituals et du gospel (superbes réalisation de John Davis et Bessie Jones), les Mardi Gras Indians apparaissant également. Blues et gospel (et même soul avec le fameux Chain gang de Sam Cooke) figurent en nombre sur le dernier CD, avec de très grands : Bo Diddley, John Lee Hooker, Robert Pete, Josh White, Professor Longhair, J. M. Gates, Sister Ola Mae Terrell, Golden gate Jubilee Quartet, Blind Boys of Alabama, Charioteers… A noter enfin des extraits de discours de Marcus Garvey, dont le ton fait froid dans le dos ! Une merveille à ne pas aborder comme un disque classique, mais une étude sur un secteur de l’histoire du « peuple noir » par le prisme de la musique. L’attribution de la note tient autant compte du travail de recherche (avec notamment pour résultat un livret très complet signé Bruno Blum) que de l’aspect purement artistique.
Par Daniel LEON – SOUL BAG