Magnifique surprise. On l’avait aperçue, très jeune, comme chanteuse du big band de Claude Bolling. Depuis elle a suivi patiemment un chemin qui s’est rodé au sein des chœurs de « pop stars » et a secrètement mûri un vrai répertoire et formidable quintette. À ses côtés, le saxophoniste ténor David El Malek, le piano de Pierre de Bethmann, guitare d’Alban Sautour, la contrebasse de Jules Bikoko et la batterie de Dré Pallemaerts. Tous aussi magistralement à leur aise que la vocaliste, lui déroulant un accompagnement soyeux à souhait. Comment est-elle passée de Bolling à cette famille-là ? Par goût profond, et parce que les amis de son mari, le batteur Daniel Garcia-Bruno, sont devenus les siens. Ils ne jouent pas tous ensemble d’un bout à l’autre et l’album réserve des surprises, comme l’ouverture, « Love », en duo voix-batterie, ou cet arrangement de « Eleonor Rigby » par de Bethmann pour un tête-à-tête avec Laïka. Pour le reste, deux chansons d’Abbey Lincoln, des compositions de Nicholas Payton, Wayne Shorter ou Joe Henderson sur lesquelles elle a écrit des paroles, et quelques standards qui sortent des sentiers battus (« Inchworm, I Hear Music…). Soit un vrai goût, avec de vrais choix. L’interprétation est au diapason. Rien de circonstanciel, de superficiel : Laïka chante avec une musicalité rare, tant sur le plan de la mise en place (« Zigaboogaloo ») que de l’intensité émotionnelle (sublime version de « Throw it Away », dépassant peut-être l’original). Une chanteuse qui prend le temps de la maturation : elle a sacrément raison.
Par Alex DUTILH - JAZZMAN
Par Alex DUTILH - JAZZMAN