B.S. : Quand vous écrivez, la préoccupation d’être compris de tous vous guide-t-elle ?
M.O. : Non, jamais. Je ne songe pas au lecteur, au cœur de cible comme disent les directeurs des ventes chez les éditeurs, ou à quelque lectorat que ce soit. J’écris dans la langue qui me veut plus que je ne la veux. On écrit comme on est. Le tropisme tyrannique et la fascination d’un grand nombre de philosophes du XXe siècle pour les régimes autoritaires vont de pair avec une écriture qui exige la soumission, la sujétion, la domination : l’obscurantisme est l’auxiliaire de la caporalisation du lecteur ou de l’auditeur. Il n’est pas étonnant que le Sartre de la « Critique de la raison dialectique » soit illisible et que le Camus de « L’Homme révolté » soit lisible et même agréable à lire. Les disciples du premier ont fait du second un philosophe pour classe terminale parce qu’il ne s’exprimait pas comme le professeur de fac qu’a toujours été Sartre. Mais une fois époussetée la poussière de la frime conceptuelle sartrienne, le penseur qui aimait toutes les dictatures, pourvu qu’elles fussent de gauche, a accouché d’une souris aujourd’hui crevée ; alors que Camus reste le penseur de la révolte nécessaire.
Par Béatrice SUTTER – REVUE ADN
M.O. : Non, jamais. Je ne songe pas au lecteur, au cœur de cible comme disent les directeurs des ventes chez les éditeurs, ou à quelque lectorat que ce soit. J’écris dans la langue qui me veut plus que je ne la veux. On écrit comme on est. Le tropisme tyrannique et la fascination d’un grand nombre de philosophes du XXe siècle pour les régimes autoritaires vont de pair avec une écriture qui exige la soumission, la sujétion, la domination : l’obscurantisme est l’auxiliaire de la caporalisation du lecteur ou de l’auditeur. Il n’est pas étonnant que le Sartre de la « Critique de la raison dialectique » soit illisible et que le Camus de « L’Homme révolté » soit lisible et même agréable à lire. Les disciples du premier ont fait du second un philosophe pour classe terminale parce qu’il ne s’exprimait pas comme le professeur de fac qu’a toujours été Sartre. Mais une fois époussetée la poussière de la frime conceptuelle sartrienne, le penseur qui aimait toutes les dictatures, pourvu qu’elles fussent de gauche, a accouché d’une souris aujourd’hui crevée ; alors que Camus reste le penseur de la révolte nécessaire.
Par Béatrice SUTTER – REVUE ADN