« Publié en vinyle 25 cm avec pochette verte post-cubique par Paris Jazz Corner quand les disquaires avaient encore pignon sur rue au quartier latin, Cocktail D’Amour illustre à merveille la formule de Boris Vian: “En France, le blues a trois temps et s’appelle musette”. Dominique Cravic et Didier Roussin, guitaristes zinzins du musette du Paris canaille des années 30, profitent du séjour français de Robert Crumb (banjo chez les Cheap Suit Serenaders, table à dessin chez Zap Comics), invité du festival de BD d’Angoulême en 1986, pour lancer l’aventure des Primitifs Du Futur. Leurs accompagnateurs, professionnels (références chez Dee Dee Bridgewater, Lee Konitz, Toots Thielemans), sont aussi amateurs de musiques plurielles. “Accordéon Jo”, reprise de “Joe” Cornell Smelser (1930) et non Jo Privat comme crédité depuis la réédition de 2002, permet à la virtuose Florence Dionneau de sortir son instrument de l’ornière dans laquelle l’avaient plongé tant de besogneux du dépliant. “Eddie Et Lonnie” est un hommage janusien aux guitaristes pionniers du jazz Eddie Lang et Lonnie Johnson à destination des claqueurs de doigts et des tapeurs de pieds. Crumb, à qui ses collègues n’ont pas laissé que des miettes, fait chauffer la mandoline sur “Zoo Blues (Best Year For The Bestiary)”, adaptation inavouée du “Rope Stretchin’ Blues” de Blink Blake (1931) aux paroles plus tragiques. Les 12 titres bonus des sessions de 1974, 1979 (Bluestory) et 1981 (The New Blue 4) montrent que nos saltimbanques de baluche, avant de pratiquer un mélange surréaliste (le musette du Delta), ont eu leur période bleue (le blues de Nogent). »
Par Jean-Christophe BAUGE – PARIS MOVE
Par Jean-Christophe BAUGE – PARIS MOVE