« Aussi adulé de par le reste du monde que souvent controversé dans son propre pays, Astor Piazzola fut en quelque sorte le premier punk du tango argentin. À cette différence près que, contrairement à la plupart de ses équivalents du rock anglo-saxon, Piazzola était pour sa part un virtuose, doublé d’un érudit. Rompu (comme Quincy Jones, Michel Legrand et Lalo Schifrin) à l’enseignement parisien de la grande Nadia Boulanger, il chercha sa vie durant à s’affranchir des carcans du tango traditionnel, tout en en élargissant les passerelles (tant vers les orchestrations classico-symphoniques que vers le jazz, jusqu’à ses expressions les plus modernes). Capté lors du Festival International de Guitare à Liège en 1985, ce concert d’exception vit le compositeur émérite (et maître incontesté du bandonéon) serti dans l’écrin prestigieux de l’Orchestre Philarmonique Royal de Liège, sous la direction du guitariste et compositeur cubain Leo Brouwer, ainsi que du directeur du festival, le guitariste Guy Lukowski. Avec les apports décisifs du guitariste virtuose Cacho Tirao et du flûtiste belge Marc Grauwels, cet enregistrement retrace les créations mondiales d’une pièce majeure du répertoire tardif d’Azzolla, l'”Histoire du Tango” (en 20 minutes et quatre mouvements), suivie du “Conciertango de Buenos Aires” de Tirao. Introduits par une émouvante version du classique de Piazzolla “Adios Nonino” (dédié à son défunt paternel), ces concerts déclinent en délicatesse et majesté le romantisme et la mélancolie de cet art majeur argentin que l’immigré français Carlos Gardel porta sur les fonds baptismaux, avant que des novateurs tels que Horacio Salgàn, Eduardo Rovira, Astor Piazzolla ou le Quarteto Cedron ne lui confèrent ses lettres de noblesse. Un grand moment de musique classique sud-américaine. »
Par Patrick DALLONGEVILLE – PARIS MOVE