« Ashkenaze et séfarade par sa mère (et anglais par son père), Marc Crofts s’est forgé une identité musicale dépassant ses origines, ce qui lui vaut de jouer avec des musiciens du monde entier, d’Istanbul jusqu’à Séville. Son intérêt pour les musiques traditionnelles et folkloriques a pris racine dans son enfance, et par-delà la musique classique (dont il est aussi imprégné), c’est en famille qu’il s’est familiarisé avec l’improvisation, le jazz, le klezmer et les musiques latines. D’abord fasciné par le charango, il opta très tôt pour un autre instrument de petite taille : le violon. Nous avons déjà chroniqué il y a quatre ans son “Nomadim” (ICI), et en parallèle à ses différents engagements, Marc dirige son Klezmer Ensemble, au sein duquel il explore la part ashkenaze de son héritage musical, et son rapport à la tradition. Pour son premier album sous cette entité, il a rameuté trois complices d’horizons divers (Suisse, France, Pologne, Bulgarie), et arrangé quatorze traditionnels à partir de transcriptions de l’ethnomusicologue Moshe Beregovski. Avec les apports respectifs de Crofts au violon, Atanas Marinov à la clarinette, Seraphim von Werra à l’accordéon et Piotr Wegrowski à la contrebasse, le Klezmer Ensemble ravive ainsi un patrimoine dont la permanence s’illustre désormais autant via les expériences de fusion d’un David Krakauer que par celles de revivalistes tels que Joel Rubin, Joshua Horowitz, Zev Feldman et Andy Statman. Les digressions instrumentales (tel l’accordéon sur le vocal “Ven Ikh Zol Hobn”) n’altèrent jamais le caractère fondamentalement vernaculaire du répertoire, auquel la clarinette imprime sa marque distinctive (les enjoués “The Poet’s Nigun”, “Weaver From Jelal”, “Zay Gezunt” et “Sakhinovski Skotchne”, ou les languides “Volekh”, “Papir Iz Vays”, “Rozmarin Nign”, “Anonymous Nign” et “Perelman’s Tish-Nign”), tandis que le violon s’y révèle tout aussi essentiel (“Belorussian Skotchne”). Bien que ni religieuse, ni prosélyte (“Il n’y a qu’un seul Dieu, et nous n’y croyons pas”), la démarche de Marc Crofts n’en demeure pas moins communautaire, mais au sens plus œcuménique que revêt désormais la diaspora klezmer en ce nouveau millénaire. Et puisque la musique représente déjà en soi un langage universel, point n’est besoin de considérations confessionnelles ou géopolitiques pour l’apprécier. »
Par Patrick DALLONGEVILLE
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