« Pour que ma vie demeure Vol. 20 » "Nous voilà arrivés au terme de ce travail exceptionnel entrepris par Patrick Frémeaux avec la collaboration érudite de Daniel Nevers et commencé il y a dix ans. Patrick Frémeaux explique en introduction tout ce qu’une entreprise de cette sorte implique de conviction dans une époque où les disques ont du mal à rester plus de trois mois en vente et les labels à rester stables plus de 5 ans. Ca rappelle les propos lus dans Jazz Hot. Il est arrivé à la même conclusion par son vécu d’éditeur. Daniel Nevers, le spécialiste, explique aussi sur le plan technique qu’il sait que cette intégrale n’en est pas une, car il existerait d’autres prises du génial Django connues par la tradition orale mais pas accessibles." Yves PORTIS – JAZZ HOT
« Pour que ma vie demeure Vol. 20 » « Nous voilà arrivés au terme de ce travail exceptionnel entrepris par Patrick Frémeaux avec la collaboration érudite de Daniel Nevers et commencé il y a dix ans. Patrick Frémeaux explique en introduction tout ce qu’une entreprise de cette sorte implique de conviction dans une époque où les disques ont du mal à rester plus de trois mois en vente et les labels à rester stables plus de 5 ans. Ca rappelle les propos lus dans Jazz Hot. Il est arrivé à la même conclusion par son vécu d’éditeur. Daniel Nevers, le spécialiste, explique aussi sur le plan technique qu’il sait que cette intégrale n’en est pas une, car il existerait d’autres prises du génial Django connues par la tradition orale mais pas accessibles. C’est la loi du genre, et tant mieux d’une certaine façon que Django conserve une part de mystère à même de faire encore rêver et chercher des générations. Le propre du génie est justement qu’on ne peut le circonscrire à une intégrale, car une vie de génie, c’est 24 h sur 24 h de génie, et celui de Django a dû le plus souvent échapper au micro. Tant pis pour nous et tant mieux pour le rêve. On attend un Indiana Jones à la recherche de l’enregistrement perdu. Daniel Nevers dans son livret ouvre les pistes avec la modestie du chercheur, et c’est passionnant à lire, car s’il existe une qualité chez Django, c’est le mystère, l’ombre qu’il a entretenu dans toute sa vie, avec ses moments de présence et ses longues absences pour convenance personnelle. Django aurait mérité le surnom de Charlie Parker, Bird, tant il a pris de liberté avec la vie, avec la musique, la pliant à la force de son génie naturel. Dans l’écoute de Django, il y a aussi cette intensité de la note (puissance de l’attaque de la corde), toujours vibrante, qui ne laisse pas indemne comme l’intensité de Billie Holiday, Coleman Hawkins, Bud Powell et Charlie Parker. Cette intensité sombre et parfois tragique (magnifique « Yesterday ») qui donne plus de relief aux éclairs de lumière, ces 20 volumes de double CD vous la restituent, et c’est un véritable cadeau pour les amateurs, comme si vous aviez l’intégrale des œuvres de Cézanne à la maison, sur vos murs, commentées par un connaisseur.
Ces deux derniers volumes reprennent les enregistrements de 1950 à 1953, et il y a inévitablement un addendum reprenant les enregistrements qui ont été découverts après coup pendant ces dix ans de recherche. On gardera dans le cœur cette voix de Django, très nature, qui apparaît au cours d’émissions enregistrées, une voix distinguée, modeste et réservée à la Brassens, un « Belleville » et un « Nuages » de rêve en solo de l’été 1950, et les constantes qui font l’art de ce musiciens exceptionnel : l’imagination, la virtuosité (« Impromptu »), et surtout qu’il est un vrai musicien de jazz dont les ponctuations à la guitare ont la puissance des ensembles de trompettes, dont l’accompagnement est toujours exceptionnel et dont les improvisations se baladent sur le temps sans jamais perdre le fil ru récit (« Vamp »). A propos de cette période, Daniel Nevers s’interroge sur la relative rareté des enregistrements de Django, et si peu en compagnie de musiciens américains qu’il côtoyait pourtant. Sans doute en effet manque-t-il à la fin de sa vie un autre Charles Delaunnay malgré l’apparition des premiers affairistes du disque. » Yves PORTIS – JAZZ HOT