Quand une interprète rencontre une autre interprète, elles se racontent… des histoires d’interprète. Si Gréco et Elzière se sont en vérité peu croisés, le compliment que l’ainée lança un jour à la débutante – « C’est comme ça qu’il faut chanter ! » - justifie à lui seul cet hommage. C’est un prétexte, mais ne boudons pas notre plaisir : cet album paru l’an passé au Japon, aujourd’hui édité en France, est un régal. L’éventail des auteurs ayant offert une chanson à la muse de Saint-Germain – avant, parfois, tels Gainsbourg ou Brel, de la reprendre à leur compte -, est si vaste qu’il y avait l’embarras du choix. La sélection privilégie les années 50-60 avec, outre les deux déjà cités, des écrivains (Vian, Queneau), ACI de prestige (Brassens, Trenet) ou « variéteux » classieux (Jean-Max Rivière & Gérard Bourgeois). Musicalement, le disque démarre « Accordéon », mais c’est une fausse piste : l’essentiel est joué, cette fois, en trio guitare-piano-contrebasse. Claire Elzière nous fait redécouvrir avec grâce plusieurs facettes de Gréco : du vachard « Si tu t’imagines » au bonbon « Tout doucement », en passant par une étonnante « Musique mécanique ». Même l’archirebattue « Javanaise » (au Rhodes amoureux) réussit à surprendre encore. Il y a même une nouveauté : la chanson titre, signée Emmanuel Guibert sur une musique de Dominique Cravic, qu’on sifflote longtemps après.
Par Nicolas BRULEBOIS - HEXAGONE