« Une belle leçon de choses » par Soul Bag

S’il existe un spécialiste mondial de Ray Charles, c’est bien Joël Dufour, et la série de compilations et coffrets qu’il supervise chez Frémeaux en est une des preuves. En cette année su 20e anniversaire de la mort du Genius, Joël propose de revenir d’une part sur les influences de Ray Charles, mais aussi sur l’impact qu’il a eu sur ses collègues musiciens du 20e siècle. Vaste programme donc, traité pour l’occasion en 7 CD. D’où vient en effet Ray Charles ? C’est d’abord le jukebox du Red Wing Café à Greenville, Floride, qui fascine le tout jeune apprenti pianiste. Du boogie, du blues rural, le jazz des big bands, mais surtout les chanteurs et chanteuses, noirs, Al Hibbler, Ella Fitzgerald, ou blancs, Bing Crosby et particulièrement une certaine Jo Stafford captent l’oreille de Ray. Mais les débuts professionnels se font surtout sous l’influence de Nat King Cole et Charles Brown (Travelin’ Blues). Ces débuts se font en Californie et sont l’occasion pour le chanteur-pianiste de découvrir Lloyd Glenn et Lowell Fulson (Sinner’s prayer) qu’il accompagnera pendant deux ans. Puis c’est la Nouvelle-Orléans et les rencontres avec Guitar Slim (Feelin’ sad) ou Tommy Ridgley alors que Ray rencontre le succès sur Atlantic. Joël Dufour nous parle aussi du gospel que Ray Charles osa intégrer à sa musique, puis de la country qu’il entendait déjà tout petit en Floride avant d’oser là aussi en chanter lui-même en 1962. Ce sont donc pas moins de 4 CD et bien d’autres noms qui nous sont proposés pour appréhender la richesse de l’univers de Ray Charles et mieux comprendre son immense succès. Qu’en reste-t-il ? Le musicien a-t-il, à son tour, influencé la soul et le jazz des quatre dernières décennies du 20e siècle ? A l’évidence, oui, et Joël de citer, entre autres, pour la soul Stevie Wonder et Donny Hathaway, pour le jazz Jimmy McGriff et Yusef Lateef. Et c’est en dehors des Etats-Unis que Ray aura aussi un profond effet sur des Eric Burdon, Van Morrison ou Joe Cocker, chanteurs qui éclaireront la pop des ‘60s et des ‘70s. Laissons le pianiste Allen Toussaint conclure : «  Les intros au piano, les arrangements étaient d’une qualité inestimable ; Ray agrandi notre univers musical, il était tellement plus créatif que tout le monde… » Merci Joël pour cette belle leçon de choses, c’est promis, nous chérirons ces deux livrets érudits.

Par Eric HEINTZ – SOUL BAG