Il existe des mariages heureux. Celui de Nadine Palmier et Joëlle Rigal, scellé sur un clavier, a généré avec le temps une solide complicité. Ces deux musiciens français, disciples de Badura-Skoda – qui prête pour la circonstance un instrument de sa collection (un Paul McNulry d’après Walter) – réaffirment leur attachement au pianoforte et, après une amorce chez Arion (68028), signent l’intégrale de l’œuvre pour piano à quatre mains de Mozart. On retrouvera ici l’osmose musicale, une perception fine et juste du style mozartien, un style qu’ils servent avec rigueur, mesure et sobriété. Le toucher détaché, un peu sec qu’induit le pianoforte – même si celui-ci conserve sa sonorité feutrée – façonne un jeu charpenté, tonique, aux structures bien découpées (importance de l’accentuation), mais aussi moins porté, de fait, à de fluides méditations. Et on aura toute liberté de préférer, dans les mouvements lents, l’intériorité et le coulé soyeux du couple Lee-Ivaldi (Arion 268 136). De même, les tempos souvent rapides, pour galvanisant qu’ils soient, engendrent quelques confusions, et incidemment une lisibilité moins nette dans le registre grave. Mais nul doute qu’à travers la qualité musicale, le goût et la franche simplicité de cette approche, le duo Palmier-Rigal aura donné à entendre une illustration concrète de ce son « Art du clavier bien partagé ».
Elisabeth BOURGOGNE - DIAPASON
Elisabeth BOURGOGNE - DIAPASON