En mettant la galette de cette nouvelle production de Frémeaux & associés dans le lecteur CD, on pourrait se dire : « Mais que nous ont-il encore déniché comme trésor musical ? » Et on aura raison. Une fois de plus, bonne pioche car la musique mestiza (métisse) des campagnes mexicaines n’a jamais été largement diffusée. Et pour cause : le monde entier apprécie les mariachis, mais ne connaît pas leur origine. Tout le monde aujourd’hui pense que cette musique se joue surtout avec des trompettes mais oublie qu’aux origines, il n’y a pas encore si longtemps (quarante ou cinquante ans), les groupes de mariachi ne se jouaient qu’au violon et guitare. Grâce à cet album dans la collection dirigée par François Jouffa, c’est une partie du patrimoine musical qui est sauvée au Mexique. L’intelligence de ce nouvel opus, comme beaucoup de réalisations de cet éditeur, c’est de nous donner un maximum d’informations au travers d’un livret de seize pages (en français et anglais). Les vingt-trois titres sont divisés en deux parties. Une partie (treize titres) est dédiée aux musiques et chants Huastèque remarquable pour son utilisation de la voix de tête (falsete). Et les coplas chantées sont souvent des quintillas d’origine populaire, tantôt joyeux et optimistes. L’autre partie (dix titres) est plus mestiza (métissée), avec des chants plus naturels et une poésie plus populaire. Car même si aujourd’hui, on ne peut confondre la musique mexicaine avec une autre, cette musique est née du mariage (forcé ?) de trois cultures très éloignées : indienne, africaine et européenne. Et comme toutes les musiques métissées, elle est fortement ancrée dans la culture de ce pays et forme un rempart (heureusement) contre la mondialisation. Même si cet album s’intitule « L’art disparu du violon huastèque », le violon n’a pas disparu complètement aujourd’hui. Bien au contraire, beaucoup de groupes ont leur section violon dans les mariachis animant et représentant par le monde la musique mexicaine. Mais comme en Louisiane (pas très loin sur la plan géographique), le style des violons a change, plus « propre », plus classique. Qu’importe, cette musique reste une musique toujours vivante et appréciée aujourd’hui par sa grande originalité. Avec ces collectages recueillis sur le vif entre 1969 et 1976 par Adriana Casanova et Serge Roterman qui ont parcouru le Mexique à la recherche de la vraie musique populaire, ce disque prend une importance capitale. C’est un témoignage préservé, qui pourra toujours être vivant par l’écoute que chacun peut en faire. Et c’est ça l’essentiel.
Par Patrick PLOUCHART – TRAD MAG
Par Patrick PLOUCHART – TRAD MAG