« La vie de Pierre Barouh est remplie de ces aventures qui n’arrivent qu’aux saltimbanques dans son genre. Un jour de 1969, ou plutôt une nuit, le cinéaste Pierre Kast lui propose de le rejoindre à Rio où il va tourner un film documentaire sur les rites macumba et cambomblé. Grâce à ce passionné de samba et de bossa nova qu’est Barouh, on pourrait en effet réunir quelques-uns des meilleurs chanteurs et musiciens brésiliens du moment. Barouh débarque le jour dit de l’avion pour apprendre que le cinéaste va quitter la ville afin de rejoindre Bahia. Qu’à cela ne tienne, ayant devant lui quelques jours, Barouh entraîne le cameraman et l’ingénieur du son de Kast auprès d’une poignée d’artistes. Filmé en totale improvisation, « Saravah » est la réunion de séquences pleines de vérité. Voici d’abord les deux anciennes grandes vedettes populaires que sont Pinxiginha et João da Bahiana. Bien entendu, ceux-ci chantent. « Saravah » n’est pas à proprement parlé un film documentaire. On n’y explique rien, on s’y contente de montrer et de faire écouter des anges tels que Clementina de Jesus et Maria Bethania. Celle-ci, attablée pour un repas entre amis, interprète de vielles sambas en compagnie de Paulinho da Viola. On est subjugué par cette voix à la fois joyeuse, puissante et douce-amère. Quant aux passages dans lesquels intervient Baden Powell – ah ! cette cigarette fichée entre les doigts quand il pince ses cordes – ils nous saisissent par leur intensité. Le temps de déguster un duo Powell/Barouh et nous voici en 1998 dans la favela de Canta Galo à Rio. Un autre cinéaste est là. Walter Sales (réalisateur de « Central do Brasil ») mène en effet Barouh auprès d’un étonnant personnage. Adao est son nom. Gravement blessé au cours d’un règlement de comptes, il n’en est pas moins d’une grande vivacité. Face à Barouh, bluffé, le voilà qui chante quelques-unes de ses chansons percutantes. Le Français en fera enregistrer une par Bïa pour le label Saravah mais on n’aura malheureusement pas l’occasion d’écouter un disque de ce superbe inconnu car il décédera quelques temps après le tournage. C’est ça le cinéma de Barouh, des rencontres et des occasions qui “produisent” des moments de vie aussi légers que profonds. Les fans du chanteur-cinéaste noteront qu’il tient une sorte de carnet de note vidéo dont certaines pages sont éditées en dvd par les Japonais d’Omagatoki. Par exemple un « Ca va, ça vient (bis…) » qui montre la tournée de la fanfare Kobocha Shokai en France durant l’été 2003 – qui leur fait croiser Sanseverino sur scène – et des séquences filmées dans des cabarets de Tokyo. »
Par Michel Doussot – Routard.com
Par Michel Doussot – Routard.com