Et Saravah va par Enseignement Catholique Actualités

« Tout ça parce que personne n’a voulu de ses “cha ba da ba da” ! Pierre Barouh, auteur sur une mélodie de Francis Lai (compagnon récurrent de ses pérégrinations musicales) de la chanson titre du film Un homme et une femme, las de démarcher les éditeurs de musique, décide de faire le travail lui-même et fonde Saravah. Quelqu’un a sûrement perdu là l’occasion de s’offrir un château en Ecosse ou une villa à Beverly Hill, mais pour nous le résultat est le même : la maison Saravah est inscrite au patrimoine grâce à Frémeaux & Associés dont c’est la vocation. Et nous avons l’avantage de pouvoir la visiter.
En 2 CD et 38 titres, tous les artistes ou presque sont là. Certains sont même là un peu plus que d’autres. “C’est normal !”, diraient Brigitte Fontaine et Areski qui, avec Jacques Higelin, se taillent la part des artistes emblématiques. Dix titres à tous les trois dont Comme à la radio, Remember et… Cet enfant que je t’avais fait (1967. Festival du jeune cinéma de Hyères. Un film rare en projection : Les encerclés de Christian Gion. Jamais revu depuis. Pourtant des images restent, d’Higelin et Brigitte Fontaine tournoyant dans un coin de campagne en chantant l’une des dix plus belles chansons de tous les temps).
Inventaire subjectif
Quand Pierre Barouh est venu lui proposer d’enregistrer un disque, Jean-Roger Caussimon lui a dit : “Mon cher, vous allez perdre tout votre argent.” Et notre producteur, qui a le droit d’être fier, de préciser : “Il était trop pudique pour dire qu’il en avait envie. Cette aventure l’a propulsé sur les routes et a illuminé les quinze dernières années de sa vie.”
Caussimon qu’on retrouve ici avec trois titres (dont Monsieur William). Caussimon que Barouh salue dans une chanson de Viking Bank.
Chez Saravah, dans les premières années quatre-vingt, Maurane était l’interprète sensible de textes subtils (Elle attend, Je me roule en boule).
La maison, un temps le refuge d’Allain Leprest, le coco le plus rock dans la chanson “à texte” (Je hais les gosses… Même pas vrai !), abrite toujours sa sœur de zinc, Françoise Kucheida, interprète naturelle de Prévert et Crolla (Cœur de rubis).
CD2, plage 3 : le dernier écho de Mon amour par Bïa s’est à peine éteint que – miracle des correspondances ! – les premières notes de Ces moments-là – d’Aram Sédéfian viennent le prolonger. On a alors l’impression que la première a tendu le micro au second qui l’a précédée de… vingt ans dans le studio d’enregistrement.
Saravah abolit le temps, mais pas l’espace qui nous est imparti. La fin de cet inventaire subjectif sera donc précipitée : il y a Gérard Ansaloni, poète du Midi qui joue du vocabulaire avec sa voix à percussion ; David McNeil et son classique de la chanson vagabonde (Hollywood), Fred Poulet qui présente ses irrespects à J’attendrai, Pierre Louki, conteur pudique de son amitié avec Brassens… Et il y a aussi ceux qui ne sont pas là. Car l’histoire ne s’arrête pas en 2002 pour Saravah, le beau navire, qui vient d’accueillir Yannick Saulnier. Ce Nantais a rencontré Pierre Barouh au café de son coin de ville. Ça ne s’invente pas. Ça se vit. » René Troin – Enseignement Catholique Actualités