Ce 3e volume triple couvre environ une année, il débute le 8 octobre 1925 pour s’achever le 16 novembre 1926. Louis Armstrong se trouve d’abord avec le groupe de Clarence Williams, dans lequel Buster Bailey tient de soprano, pour Coal cart blues et Santa Claus blues chantés par Eva Taylor, le second titre se termine sur une collective propulsée par une exubérante partie de cornet. Suit une version totalement différente, sur tempo lent, avec trio instrumental accompagnant un trio vocal peu performant mais recevant un admirable quoique lointaine contre-chant du cornet. Il se fait également discret dans Squeeze me mais brille dans You can’t shush Katie intercalant un chorus superbement détendu dans le vocal d’Eva Taylor. Louis rend une dernière visite à Fletcher Henderson pour TNT et Carolina stomp où il n’intervient que brièvement, Joe Smith apparaît vers la fin des deux morceaux. Une demi-page du livret est réservée à des commentaires ironiques sur le fait qu’Hugues Panassié pensait que Louis Armstrong ne participait pas à ces deux enregistrements. Effectivement ceci figure dans son ouvrage Louis Armstrong (Editions du Belvédère, 1947), mais l’auteur des notes n’ignore pas que cette erreur a disparu de l’édition ultérieur du livre (NEL, 1969) et que, de surcroît, elle fut rectifiée à plusieurs reprises (ex : Bulletin 135). Il semble qu’un livret appuyant une telle édition de référence doive s’en tenir à des renseignements biographiques et discographiques précis plutôt que de s’égarer dans une polémique mesquine… et incongrue puisque ne rendant pas compte objectivement des faits. Le séjour new-yorkais se conclut par une convocation auprès du chanteur Perry Bradford. Louis se déchaîne dans ces deux morceaux, gâchés par un enregistrement confus, mais où brillent aussi Buster Bailey à la clarinette et, probablement, James P. Johnson au piano. De retour à Chicago, une semaine plus tard en compagnie du seul Richard M . Jones au piano, Louis, constamment en évidence, donne une réplique pleine d’inspiration et d’envolée à la bonne chanteuse Bertha Chippie Hill dans Low land blues et Kid man blues et à Blanche Calloway, quelque peu emphatique, dans Lazy woman’s blues et Lonesome lovesick. Les trois premières interprétations, prises sur un même tempo lent, suivent un plan identique : introduction de 4 mesures au cornet, trois chorus chantés, un chorus de cornet, un chorus chanté, tous de 12 mesures. Le dernier de ces titres diffère un peu par utilisation de chorus de 16 mesures. Le surlendemain, Louis affronte en six reprises Hociel Thomas, chanteuse à la voix bêlante et au timing hésitant. A ses côtés se tiennent Johnny Dodds (clarinette), John St. Cyr (banjo) et Hersal Thomas (piano), oncle de la vedette. En réalité, cette série de six se réduit à cinq car un des titres a été fâcheusement oublié lors de la confection du CD 1. Il s’agit de Sunshine baby qui devait occuper la plage 15 sur laquelle figure en fait Adam and Eve had the blues. Les plages suivantes se trouvent toutes pareillement décalées, ainsi Yes I’m in the barrel se situe en 20e et dernière position, au lieu de 21e comme prévu. Moins en évidence dans cette séquence, Louis partage, en parfaite connivence, avec Johnny Dodds qui l’épaule constamment dans les contre-chants et les solos (superbes dans Adam and Eve et Put it where I can get it) hormis celui, fulgurant, de Wash woman blues. Le lendemain 12 novembre nous entrons dans la légende avec la première séance du Hot Five. Trois musiciens de la veille reviennent, rejoints par Kid Ory et Lil Armstrong qui occupera le piano. Ils inaugurent par My Heart, Louis conduit magistralement les ensembles pour l’exposé du thème et du couplet puis la collective finale, entre-temps clarinette et piano se sont manifestés en solo. Dans Yes I’m in the barrel, Louis joue d’abord un premier thème avant de mener avec une autorité souveraine les ensembles qui s’interrompent pour deux chorus de Johnny Dodds sur le blues. Le CD 2 s’ouvre sur la suite de cette séance avec un formidable Gut bucket blues. Après l’intro de banjo et deux chorus de collective sur le blues, piano, trombone, clarinette et cornet s’expriment en solo puis une merveille d’ensemble vient conclure. Louis exhorte ses partenaires et lui-même reçoit les encouragements de Kid Ory. Come back sweet papa débute par un solo de Johnny Dodds à l’alto et contient des ensembles menés avec un swing unique par Louis. On le trouve ensuite accompagnant de nouveau des chanteuses avec seulement un pianiste à son côté. Tout d’abord associé à Richard M. Jones, il donne la réplique à Chippie Hill. Il semble qu’à ce moment-là il ait abandonné le cornet au profit de la trompette qui dialogue avec la chanteuse sur Lonesome all alone and blue et prend un solo au feeling ardent. Trouble in mind débute sur un émouvant chorus alors que, dans Georgia man, le vocal laisse peu d’espace à la trompette. Il en est de même pour Baby Mae Mack, à la voix vrillant l’oreille, toutefois What kind o’man is that s’ouvre sur un solo d’une envolée et d’une éloquence remarquables. Le piano change de mains pour les deux chanteuses suivantes, Hersal Thomas revient accompagner sa nièce Hociel. Parfois le débit vocal permet seulement à la trompette de placer quelques commentaires (Deep water blues et deux suivants) mais elle compense en prenant un solo ; en revanche, sur le blues lent Lonesome hours elle peut entamer un véritable dialogue. Dans les six dernières plages, Louis et Hersal Thomas accompagnent non plus la nièce de clui-ci mais la sœur, Sippie Wallace. Comparativement à la totalité des autres enregistrements Louis paraît ici manquer de conviction. Entre-temps eut lieu une fameuse séance Hot Five. Tout a été dit à propos de ces enregistrements fondamentaux. Ils se déroulent sur une impérieuse partie de banjo et les ensembles sonnent idéalement sous la domination de la trompette. Dans Georgia grind Louis chante deux chorus, il chante aussi dans le pétillant Heebie Jeebies qui va populariser le scat, dans Cornet shop suey, cher au hcf, il tire un feu d’artifice de virtuosité inspirée. Oriental strut offre un stop chorus exemplaire, le couplet de You’re next est exécuté avec une envolée exceptionnelle enfin Muskrat ramble swingue irrésistiblement. Toutes ces phrases, ces breaks aujourd’hui devenus familiers demeurent admirables mais peut-on imaginer la fascination que ces nouveautés créèrent à l’époque.
Avant d’en venir aux trois séances suivantes, le CD 3 reprend les enregistrements des deux titres de l’orchestre Erskine Tate où Louis, mis en vedette, joue avec un punch et un mordant exceptionnels, par ailleurs l’excellent et rare Teddy Weatherford fait de bonnes apparitions au piano. A nouveau en duo avec le pianiste Richard M. Jones, Louis accompagne Nolan Welsh chanteur au bon accent dont la voix statique débite nonchalamment deux blues semi-lents en laissant une large place aux répliques du trompette en grande forme qui prend en outre un superbe chorus aussi bien dans The Bridwell blues que dans St. Peter’s blues.
Le Hot Five, en contrat avec la marque Okeh enregistra clandestinement pour la rivale Vocalion sous le nom de Lill’s Hot Shots mais, Louis ayant chanté, et avec énergie, dans Georgia bo bo, la supercherie fut instantanément éventée. Dans Drop that sack chaque musicien y va de son chorus. Don’t forget to mess around et les deux plages suivantes montrent un Louis Armstrong swinguant sans désemparer dans les ensembles et en solo, en outre il lance des vocaux furieux. La clarinette de Johnny Dodds évolue à la perfection et John St. Cyr continue d’assurer inébranlablement la partie rythmique. Who’s it contient un solo de trombone curieusement déclamatoire et Louis utilise un sifflet à coulisse. Après un accompagnement discret offert à Butterbeans & Susie dans He likes it slow, les séances se poursuivent apportant leur lot de musique débordant d’invention spontanée. Les moments exceptionnels ne manquent pas : solo de trompette d’une envolée grandiose dans The King of the Zulus, ensembles emmenés magistralement dans Big fat ma and skinny pa et Sweet little papa (avec Kid Ory en évidence), blues lent partagé entre vocal au timing admirable et clarinette dans Lonesome blues. Enfin, la dernière séance du recueil ajoute Jazz lips et Skid-dat-de-dat (au scat féroce) parsemés de breaks imprévus, Big butter and egg man, où après avoir subi un vocal agressif de Mae Alix, Louis chante et poursuit par un solo formidable de swing, Sunset Cafe stomp avec toujours trompette en solo et dans la conduite des ensembles et dans une étonnante coda.
André VASSET – BULLETIN DU HOT CLUB DE FRANCE
Avant d’en venir aux trois séances suivantes, le CD 3 reprend les enregistrements des deux titres de l’orchestre Erskine Tate où Louis, mis en vedette, joue avec un punch et un mordant exceptionnels, par ailleurs l’excellent et rare Teddy Weatherford fait de bonnes apparitions au piano. A nouveau en duo avec le pianiste Richard M. Jones, Louis accompagne Nolan Welsh chanteur au bon accent dont la voix statique débite nonchalamment deux blues semi-lents en laissant une large place aux répliques du trompette en grande forme qui prend en outre un superbe chorus aussi bien dans The Bridwell blues que dans St. Peter’s blues.
Le Hot Five, en contrat avec la marque Okeh enregistra clandestinement pour la rivale Vocalion sous le nom de Lill’s Hot Shots mais, Louis ayant chanté, et avec énergie, dans Georgia bo bo, la supercherie fut instantanément éventée. Dans Drop that sack chaque musicien y va de son chorus. Don’t forget to mess around et les deux plages suivantes montrent un Louis Armstrong swinguant sans désemparer dans les ensembles et en solo, en outre il lance des vocaux furieux. La clarinette de Johnny Dodds évolue à la perfection et John St. Cyr continue d’assurer inébranlablement la partie rythmique. Who’s it contient un solo de trombone curieusement déclamatoire et Louis utilise un sifflet à coulisse. Après un accompagnement discret offert à Butterbeans & Susie dans He likes it slow, les séances se poursuivent apportant leur lot de musique débordant d’invention spontanée. Les moments exceptionnels ne manquent pas : solo de trompette d’une envolée grandiose dans The King of the Zulus, ensembles emmenés magistralement dans Big fat ma and skinny pa et Sweet little papa (avec Kid Ory en évidence), blues lent partagé entre vocal au timing admirable et clarinette dans Lonesome blues. Enfin, la dernière séance du recueil ajoute Jazz lips et Skid-dat-de-dat (au scat féroce) parsemés de breaks imprévus, Big butter and egg man, où après avoir subi un vocal agressif de Mae Alix, Louis chante et poursuit par un solo formidable de swing, Sunset Cafe stomp avec toujours trompette en solo et dans la conduite des ensembles et dans une étonnante coda.
André VASSET – BULLETIN DU HOT CLUB DE FRANCE