Scott Joplin était à la Choucrouterie ; Avec ses copains modestes et géniaux, Clarence « Pinetop » Smith et John Hammond. Sébastien Troendlé réussit avec « Rag’n Boogie » le pari audacieux de ressusciter l’âge d’or du ragtime et du boogie-woogie dans une ambiance canaille.
C’est un coup de génie que de s’emparer de ce pan essentiel, injustement délaissé sur le Vieux Continent, le ragtime et son cousin le boogie-woogie. Sébastien Troendlé, pianiste aguerri formé à Bâle et mordu jusqu’au bout des doigts de rag’n boogie, redore ici les lettres de noblesse de l’incontournable révolution de Scott Joplin. Ce petit prodige afro-américain s’empare des pianos qui trônent dans les maisons de Blancs nettoyées par sa mère, et ose à l’âge adulte l’impensable : vivre de sa musique et évincer la case « métier manuel » propre aux Noirs dans l’Amérique du XIXe siècle. Et il aura réussi brillamment sa petite et si nécessaire révolution. La voix sera libre au boogie-woogie, blues, jazz et rock’n roll. Rien que ça. À l’image d’un Swanson ou d’une Stephane Trick, tous deux jeunes pianistes américains prodiges dans le rag’n boogie, Sébastien Troendlé (avec la collaboration de Jenny Macquart et Jean-Raymond Gélis) nous paie une belle piqûre de rappel. Avec un bonheur infini. Il affronte ce répertoire et le fait sien comme peu de pianistes contemporains le feraient aujourd’hui. Pour cela, il possède l’amour indicible de ces notes gaies qui renferment au fond la douleur des esclaves et la précision d’exécution. Les yeux bandés, il laisse couler dans ses veines ces enfants maudits et les rend, tout en lumière, à leurs justes parents : l’auditeur. À mi-chemin entre ciné-concert et one-man-show, le pianiste ressuscite les « barrel houses » du sud des Etats-Unis. Jean-Luc Falbriard, à la mise en scène, connaît la musique. Et imagine, sur les textes de Raphaël Scheer, un récit mi-pédagogique mi-autobiographique, teinté d’humour, dans une ambiance canaille faite de trois bricoles, un gramophone et un écran où l’immense Billie Holiday, l’immortel Charlot et les géniaux Clarence « Pinetop » Smith, Sid Le Protti ou John Hammond trouvent heureux cocoon. Seul Richard Clayderman en sort froissé. À juste titre, n’en déplaise au pianiste au casque d’or. Un spectacle lumineux et nécessaire, mijoté quinze ans durant, concrétisé sur un album à sortir sous peu chez Frémeaux & Associés. Courez-y.
Par Iuliana SALZANI-CANTOR – DERNIERES NOUVELLES D’ALSACE
C’est un coup de génie que de s’emparer de ce pan essentiel, injustement délaissé sur le Vieux Continent, le ragtime et son cousin le boogie-woogie. Sébastien Troendlé, pianiste aguerri formé à Bâle et mordu jusqu’au bout des doigts de rag’n boogie, redore ici les lettres de noblesse de l’incontournable révolution de Scott Joplin. Ce petit prodige afro-américain s’empare des pianos qui trônent dans les maisons de Blancs nettoyées par sa mère, et ose à l’âge adulte l’impensable : vivre de sa musique et évincer la case « métier manuel » propre aux Noirs dans l’Amérique du XIXe siècle. Et il aura réussi brillamment sa petite et si nécessaire révolution. La voix sera libre au boogie-woogie, blues, jazz et rock’n roll. Rien que ça. À l’image d’un Swanson ou d’une Stephane Trick, tous deux jeunes pianistes américains prodiges dans le rag’n boogie, Sébastien Troendlé (avec la collaboration de Jenny Macquart et Jean-Raymond Gélis) nous paie une belle piqûre de rappel. Avec un bonheur infini. Il affronte ce répertoire et le fait sien comme peu de pianistes contemporains le feraient aujourd’hui. Pour cela, il possède l’amour indicible de ces notes gaies qui renferment au fond la douleur des esclaves et la précision d’exécution. Les yeux bandés, il laisse couler dans ses veines ces enfants maudits et les rend, tout en lumière, à leurs justes parents : l’auditeur. À mi-chemin entre ciné-concert et one-man-show, le pianiste ressuscite les « barrel houses » du sud des Etats-Unis. Jean-Luc Falbriard, à la mise en scène, connaît la musique. Et imagine, sur les textes de Raphaël Scheer, un récit mi-pédagogique mi-autobiographique, teinté d’humour, dans une ambiance canaille faite de trois bricoles, un gramophone et un écran où l’immense Billie Holiday, l’immortel Charlot et les géniaux Clarence « Pinetop » Smith, Sid Le Protti ou John Hammond trouvent heureux cocoon. Seul Richard Clayderman en sort froissé. À juste titre, n’en déplaise au pianiste au casque d’or. Un spectacle lumineux et nécessaire, mijoté quinze ans durant, concrétisé sur un album à sortir sous peu chez Frémeaux & Associés. Courez-y.
Par Iuliana SALZANI-CANTOR – DERNIERES NOUVELLES D’ALSACE