Engraisser les sillons du laboureur anonyme c’est le véritable avenir du véritable soldat ! ah ! camarade ! Ce monde n’est je vous l’assure qu’une immense entreprise à se foutre du monde ! ». Les mots tombent drus, la langue est crue, le monde crapoteux et peuplé d’individus minables qui ne cherchent qu’à sauver leur peau. L’univers hallucinant et halluciné de Voyage au bout de la nuit (qui devrait s’appeler Voyages, tant Bardamu a voyagé) vous arrive comme un coup de poing dans la figure, comme la réalité en fait ; ce chef d’œuvre du siècle précédent (même s’il émane d’un écrivain médecin aux convictions par ailleurs nauséabondes) qui fit scandale, a chamboulé les esprits car il conte les aventures peu glorieuses d’un anti-héros médecin qui tente tant bien que mal de soigner sa vie, convenait parfaitement par la verdeur de la langue et des « dialogues » à une adaptation orale du texte. C’est Denys Podalydès – par ailleurs sociétaire de la Comédie Française – qui relève le défi des 16 CD de 60 minutes chacun, endossant à plaisir les multiples personnages d’un récit raconté à la première personne, celle de Bardamu à qui il parvient à donner vie sur un ton où l’on perçoit la lucidité et le timbre où sourd une vie en guenilles…
Bernard ROISIN – LE JOURNAL DU MEDECIN
Bernard ROISIN – LE JOURNAL DU MEDECIN