Dès les premiers enregistrements de Bo Diddley, il est difficile de qualifier sa musique. En 1959, début de la période couverte par ce deuxième volume concocté par Bruno Blum, le doute n’est plus permis : il faut parler de « Diddley style ». Rock and roll, blues, country, surf, variété, autopromotion de son personnage, Bo mélange tout avec bonheur, enregistrant en totale liberté dans son propre studio, les nombreuses fins en « fading » montrant qu’il y avait là beaucoup de choses improvisées. Le son est dantesque, l’écho plus que caverneux, les guitares fuzzent, ce ne sont plus seulement les prémices du surf mais aussi du psychobilly des années 1980. Bo superpose les couches rythmiques, batterie, basse, maracas, piano, guitares, et c’est l’ensemble qui fait la mélodie. Il a également une des voix noires les plus évocatrices. Avec lui, la puissance du gospel, la profondeur du blues, la hargne du rock and roll et la suavité des crooners, se mélangent dans un message ambigu, que restituent bien ses fameuses bluettes, armes fatales à ne pas négliger, parties intégrantes de l’univers du maître, en apparence gentillettes, en réalité perverses, tout comme l’allure élégante et ultra sensuelle de ses acolytes féminines Lady Bo (Peggy Jones) et The Duchess (Norma-Jean Wofford). Ce triple Cd contient des titres de référence, « I can tell » et sa monstrueuse ligne de basse, « Bo Diddley is loose », « Whoa mule », « Ride on Josephine », « You can’t judge a book », des instrumentaux de la mort, « Sad sack », Diddling », « Help out », « Bo’s bounce », des ballades sournoises, « No more lovin’ », des blues à ras de terre, aaaah ! « Call me » et son solo de guitare interrompu, de la country démembrée, « Sixteen tons », tout y est. L’ensemble confirme le triomphe de la négritude à la Bo Diddley sur la musique populaire du XXe siècle.
Par Christophe MOUROT – SOUL BAG
Par Christophe MOUROT – SOUL BAG