Voici le dernier volume de cette magnifique « intégrale », malheureusement avec les guillemets dus à un changement imprévu des lois concernant le domaine public sur les enregistrements phonographiques. Dommage, car la Sister n’avait que 46 ans fin décembre 1961 et était en pleine forme. Témoins ses impressionnates interprétations dans les trois CD : que ce soit en studio ou live, Rosetta chante avec une telle ferveur qu’on a l’impression qu’elle crée à l’instant ces paroles de gospel. C’est ainsi qu’elle entraîne irrésistiblement l’orchestre de Chris Barber, dont trois inédits ouvrent le premier disque, et qu’elle envoûte et enthousiasme les publics européens par ses harangues et ses incitations tant chantées que parlées. Mêmes impact sur les scènes new-yorkaises : dans Joy in this land un sax ténor, encouragé par Rosetta, s’emballe et injecte son énergie à tout l’orchestre. Comme dans le volume précédant des chœurs sont parfois ajoutés, mais malgré leur rôle d’ambiance peu dans le coup, Rosetta n’y perd rien de son dynamisme. Avec une vraie chorale gospel, comme les Gospel All Stars, elle se donne évidemment avec plus de facilité. A part sa guitare, plus autoritaire que jamais, Rosetta savait aussi jouer du piano. Sa présence dans les titres interprétés par sa mère, Katie Bell Nubin, est douteuse, et on tombe malgré soi dans le jeu des comparaisons. Katie a de la puissance, mais moins de swing et n’arrive pas à éviter la monotonie. Pour remplir les trous, on a grapillé dans la disco de Marie Knight, cette fois-ci sans la participation de Rosetta, mais avec celle de Sammy Price et de Brownie McGhee, et ces morceaux des années 1940 et 50 sont splendides. Marie nous enchante par sa voix ample et souple, mains moins dominatrice que celle de Sister Rosetta.
Par André Fonteyne – Soul Bag
Par André Fonteyne – Soul Bag