« Le 12 mars, le monde du jazz fêtera un nouvel anniversaire de sa perte en 1955. Charlie Parker avait 35 ans, pourtant peu d'improvisateurs auront provoqué autant de passion que le natif de Kansas-City. Presque soixante ans après sa mort, en effet, l'on répertorie, l'on exhume et l'on publie des inédits. Bird était suivi comme le messie. La vocaliste Anita O'Day a illustré le bouleversement : « Lorsque Charlie Parker atteignit à la renommée avec les thèmes bop, chacun modifia son style. Le batteur, le pianiste, le chanteur. Tout le monde ». Le batteur Max Roach confirme l'état d'esprit : « Bird était un peu comme le soleil qui nous donnait de l'énergie... Dans n'importe quelle situation musicale, les idées fleurissaient et inspiraient tous ceux qui étaient présents ». Une cohorte de disciples suivait le génie avec du matériel et enregistrait le moindre chorus. Hélas avec des moyens qui n'ont pas permis la conservation idéale du son. L'intégrale que publie Frémeaux (le volume 5 vient de sortir) retient uniquement les prises de studio et les transcriptions radio. Les années (1947-1948) couvrent la période de contrat avec la compagnie SAVOY. La dernière année (1949) restitue plusieurs sessions d'un All Stars au Royal Roost de New-York. Sans négliger les surprises du chef, le plus souvent des illuminations grandioses. Comme la version enregistrée en quartet de The Bird, en décembre 1947. Le témoignage du pianiste Hank Jones permet de mesurer le chef d'oeuvre : « Shelly Manne (le batteur) a du s'absenter. Aussi a-t-on continué la séance entre Charlie, Ray Brown (le contrebassiste) et moi. C'était étrange d'enregistrer sans batterie. Peut-être ont-ils préféré ne pas sortir la prise? C'était assez extravagant, parce que Charlie a joué des choses très rapides. Sans batterie, il était dur de garder le tempo. » Cette pièce en mineur, The Bird, d'une durée de presque 5 minutes, appartient à la catégorie des inspirations ultra-phénoménales de Parker. A l'égal, sur le même coffret, des trois sublimes prises de Parker's Mood. Le Blues au sommet. L'exégète Alain Tercinet peut écrire l'âme en paix que les seuls équivalents de ce que Parker vient alors d'enregistrer pour les firmes SAVOY et DIAL sont à chercher parmi les Hot Fives et les Hot Seven de Louis Armstrong à la fin des années vingt. Des fondations. On signe tout de suite. »
Par Bruno PFEIFFER - LIBERATION
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