« En 2007, Romane avait enregistré « père et fils » en duo avec Richard, son fils ainé ; avec l’arrivée de Pierre, le petit dernier, la Guitar Family Connection est au complet. L’exercice à 3 guitares, sans basse ni batterie n’est jamais évident, mais le trio a beaucoup répété et ça s’entend : mise en place, arrangements ; il n’y a par exemple jamais deux guitares rythmiques ; l’un fait les basses, l’autre la rythmique et le troisième improvise, et tout cela à tour de rôle ; avec ce dispositif, le trio sonne comme un orchestre. Trois guitares donc, deux électriques, plus la Dupont de Romane, modèle spécial équipé de deux stimer. N’étant jamais là où on l’attend, Romane se confronte ici à quelques grands standards, ce qu’il n’avait quasiment jamais fait, sur disque en tous cas. Complètement chez lui sur Over the rainbow, Take the A train et autre Round midnight Romane leur imprime sa French touch immédiatement reconnaissable : très beau son et toucher de guitare, phrasé précis et chantant, fraicheur et sens de la construction du chorus (cf son solo aérien sur Someday my prince will come). Si Romane se détache du trio, les fistons ne sont pas en reste. Souvent tentés, de par leur jeunesse, par le spectaculaire, les deux jeunes guitaristes ont compris qu’il fallait se défaire de la vitesse, dépasser la guitare pour revenir à la musique. Moins marqués par la gypsy touch, Richard et Pierre louchent vers la guitare jazz tendance Scofield, Metheny ou Benson (cf l’ambiance très groovy de Moanin’) et une esthétique plus fusion (cf la reprise de Teen town de Pastorius). Si Richard manifeste parfois quelque impatience dans ses chorus, au détriment de l’articulation de son phrasé, ses fusées font mouche (cf son remarquable solo sur Round’midnight ou le très chantant Italian prelude de sa composition sur lequel il s’envole). Le phrasé plus posé de Pierre, au beau son rond, n’exclut pas quelques accélérations nerveuses (cf sur le convaincant Red Naomi de sa composition). Rien de neuf sous le soleil me direz-vous, ce répertoire ayant été maintes et maintes fois joués depuis 50 ans et plus par de grands guitaristes (entre autres le trio Charlie Byrd, Herb Ellis, Barney Kessell) ; mais si le jazz, tout comme le rock d’ailleurs, est devenu une musique de répertoire, cette Guitar Family Connection n’a pas à rougir de ses glorieux ainés. De la belle guitare jazz. »
Par Francis COUVREUX – DJANGO STATION
Par Francis COUVREUX – DJANGO STATION