Les compilations Frémeaux & Associés sont souvent bardées de stickers rappelant à quel point elles sont prisées des amateurs et des professionnels de la profession; leur profusion me rappelle l’époque où, quand on suivait une auto, on s’amusait à reconnaître les autocs qui ornaient les vitres arrière des R12 ou des 504 qu’on s’apprêtait à dépasser (« Vas-y papa, double-le, on va plus vite que lui ! »).
Tout ça pour vous dire que “Jazz 1955-1962” est une compile joyeusement nostalgique du guitariste Sacha Distel. Hé oui, il faut, je crois, le rappeler sans cesse : avant de tresser des scoubidous, de chanter La Belle Vie, d’adapter Stevie Wonder en français et d’avoir un show TV qui portait son prénom, le beau Sacha fut dans sa première vie un excellent guitariste de jazz, et les 57 morceaux de ce triple CD le rappellent à qui l’aurait oublié.
Dans “Danse Party chez Sacha Distel avec Raymond Le Sénéchal et son orchestre” (1959), le natif du XIIème arrondissement de Paris reprend évidemment Scoubidou (“Pommes et poires”), mais aussi Nuages de Django Reinhardt, auquel il rend un hommage encore plus appuyé en compagnie de Claude Bolling, via cinq faces enregistrées en 1962 – Ivan Jullien, Pierre Gossez et encore Gérard Badini dans l’orchestre : respect (il y a même Bob Quibel à la contrebasse, ce qui nous rappelle cette fois les dimanches télévisés de Jacques Martin).
Et puis attention, Sacha l’as du manche [ceci n’est pas un exercice de diction, NDR] faisait déjà son show avec, entre autres, Lionel Hampton, Bobby Jaspar, Gérard Gustin et John Lewis, et là, on goûte non sans délectation son phrasé et son swing.
Fred Goaty (Directeur de Jazz Magazine) - L'Académie Tangentielle