« Un adroit tour du sujet » par Jazz Magazine

Jean-Paul Ricard est in vieux défenseur de la cause féminine dans le jazz et tout à la fois un ardent collectionneur de disques. Aussi pourrait-on craindre qu’il ne collectionne les enregistrements de jazzwomen comme des raretés, voire des anomalies. Mais de la mondaine Yvonne Blanc (p) à l’explosive Valaida Snow (tp, voc), chacune témoigne d’une aspiration à transcender ce qui paraissait autrefois comme anomalie. Pourtant, dès les années 1920, la formation à la Fisk University de Lil’ Armstrong profita tant à King Oliver qu’à Louis Armstrong dont elle façonna les débuts de carrière, tout comme Blanche Calloway (voc) le fit de l’art de son frère Cab (lui soufflant même à la tête de ses Her Joy Boys ce qui deviendra le célèbre « hide ho »). Ricard complète ici de quelques titres supplémentaires son triple CD consacré à la magnifique Mary Lou Williams, rappelle l’autorité de Lovie Austin (p) sur ses Blue Serenaders (Tommy Ladnier, Kid Ory, Johnny Dodds…) fait entendre Melba Liston (tb, arr) auprès de Dexter Gordon, au sein du big band de Dizzy Gillespie et à la tête de ses « Bones », la harpiste dorothy Ashby forçant les portes du jazz, les International Sweethearts of Rhythm ou le trio de Beryl Booker d’un swing à décorner les bœufs … Ricard fait un adroit tour du sujet où, pour ma part, j’aurais bien entendu la contrebassiste Thelma Terry à la tête de ses Playboys et Alice McLeod telle que l’entendit John Coltrane chez Terry Gibbs (mais en 1963, à la limite du domaine public.
Par Franck BERGEROT – JAZZ MAGAZINE