Sur fond de « folk blues revival » amorcé aux Etats-Unis dans les années 1950 et appelé à culminer à plus grande échelle durant la décennie suivante, Memphis Slim se produit au printemps 1961 à l’Olympia, où l’enregistre Europe N°1. (Un an plus tard avec son compère Willie Dixon, il sera l’un des instigateurs de la tournée inaugurale de l’American Folk Blues Festival en Europe de l’Ouest, et se Fixera définitivement en France). Devant un auditoire de quelques centaines de spectateurs, le chanteur-pianiste se montre très à l’aise, fort d’une présence naturelle et d’une distinction étudiée, déjà mise à l’épreuve de New York à Tel Aviv. Celui qui avait remplacé Josh Altheimer comme pianiste de Big Bill Broonzy en 1940 ne manque pas de rappeler ses années déterminantes à Memphis et Chicago, mais il prend soin d’introduire ses morceaux en conférencier formel ou pince-sans-rire (« Memphis est la ville la plus formidable du monde pour ce qui est d’en venir »). Son programme se partage entre les emprunts à quelques maîtres du blues pianistique et vocal (Jimmy Yancey, Leroy Carr, Roosevelt Sykes), les reprises de Broonzy et ses thèmes personnels (Beer-Drinking Woman, Pigalle Love). On sent glisser sur le clavier ses longs doigts spatulés d’où naissent des phrases tantôt fluides et nuancées, tantôt mues par de puissants automatismes. Les meilleurs moments viennent avec « Chicago Boogie Woogie » pour une main gauche à la J. Yancey, le « How Long Blues » de L. Carr, une séquence autour de « Kansas City » et un « Unidentified Boogie » où s’esquissent des figures obliques à la Big Maceo.
Par Philippe BAS-RABERIN – JAZZ MAGAZINE
Par Philippe BAS-RABERIN – JAZZ MAGAZINE