« La musique étant essentiellement un art collectif, on peut estimer que le solo de piano, ou de tout autre instrument, déroge à la règle. C’est vrai, et c’est d’autant plus risqué, car là, on se trouve face à soi-même et surtout face à tous ceux qui ont essayé avant vous. Et Dieu sait combien, parmi eux, il y a eu de génies. Passer après Chopin, Liszt, Satie, certes, est redoutable, mais également passer après Thelonious Monk, Bill Evans, Erroll Garner, Art Tatum, James P. Johnson, Claude Bolling ou Keith Jarrett, ce n’est pas simple non plus. Marc Benham ose et il a un style qui lui est bien particulier. Imaginez le stride de Fats Waller (un sorte de boogie-woogie acrobatique où la main gauche semble sauter d’un bord à l’autre) qui lui aurait été enseigné par MacCoy Tyner ou Chick Corea. Il réinterprète, à sa sauce, des grands standards (« Just You Just Me », « Angelica » du Duke, « That’s All », « Tea for Two ») ou bien joue ses propres compositions, dont trois délicieuses « Heures perdues » qui ne sont pas perdues pour tout le monde. Beaucoup d’espiègleries et de clins d’œil chez ce pianiste éminemment doué et facétieux qui n’hésite pas à réinterpréter un morceau d’Hirokazu Tanaka, l’auteur bien connu de chez Nintendo qui composa, pour la Game Boy, en 1990, ce « Super Mario Land » dans lequel, souvenez-vous, Super Mario affrontait Tatanga le Maléfique. Et je puis vous affirmer que c’est du sacrément bon jazz. Au total, un grand et beau CD qu’on réécoute. »
Par Michel BEDIN – ON MAG
Par Michel BEDIN – ON MAG