Luc Ferry est philosophe, on aurait parfois un peu trop tendance à l’oublier. Passionnant passeur de la pensée allemande, de Kant à Horkheimer, polémiste talentueux, l’ex-ministre livre ici un plaidoyer pour un nouvel humanisme fondé sur l’amour et l’altérité.
Tout le monde croit le connaître. Avec son allure élancée et sa chevelure endiablée, il figure, avec Elisabeth Badinter et Jacques Attali, parmi les « intellectuels influents » du pays. Talentueux professeur de philosophie devenu essayiste à succès et ex-ministre de l’Education nationale, il passe pour un intellectuel libéral qui n’aurait cessé de défendre les droits de l’homme et la morale laïque contre les philosophies du soupçon nées en 1968 (Michel Foucault, Pierre Bourdieu, Jacques Derrida, etc.). C’est un tout autre parcours et une toute autre ambition qui se révèle dans cet entretien. Celui d’un jeune homme asocial et autodidacte, fils d’un constructeur automobile également grand résistant, qui a vécu Mai 68 à la campagne avant de se mettre à lire et à traduire pendant vingt ans la philosophie, en particulier juive allemande. Celui d’un jeune philosophe qui entend Theodor Adorno et Max Horkheimer prendre acte de l’éclipse de la raison à Auschwitz, mais voit dans la déconstruction de toutes les valeurs le prélude au cynisme. Celui d’un restaurateur du « kantisme » en France qui mesure sur le tard que l’œuvre de Nietzsche est ce qu’on a produit de plus profond philosophiquement. Celui d’un défenseur de l’éthique des Modernes qui découvre que, pour faire face aux questions extra-morales sur le sens de la vie, L’Odyssée d’Homère est indépassable. Celui d’un ministre ambitieux qui se rend compte que les bonnes intentions – lutter contre l’illettrisme, par exemple – ne suffisent pas en politique. Si, comme il l’annonce ici, il a renoncé à la politique, Luc Ferry prétend faire œuvre plus utile en forgeant une nouvelle spiritualité pour notre temps. A ses yeux, la valeur ultime de nos vies ne réside plus en Dieu, la Nation ou la Révolution, mais dans l’Amour. Brillant ou candide ? Les deux, sans aucun doute.
Par Martin LEGROS et Alexandre LACROIX – PHILOSOPHIE MAGAZINE
Tout le monde croit le connaître. Avec son allure élancée et sa chevelure endiablée, il figure, avec Elisabeth Badinter et Jacques Attali, parmi les « intellectuels influents » du pays. Talentueux professeur de philosophie devenu essayiste à succès et ex-ministre de l’Education nationale, il passe pour un intellectuel libéral qui n’aurait cessé de défendre les droits de l’homme et la morale laïque contre les philosophies du soupçon nées en 1968 (Michel Foucault, Pierre Bourdieu, Jacques Derrida, etc.). C’est un tout autre parcours et une toute autre ambition qui se révèle dans cet entretien. Celui d’un jeune homme asocial et autodidacte, fils d’un constructeur automobile également grand résistant, qui a vécu Mai 68 à la campagne avant de se mettre à lire et à traduire pendant vingt ans la philosophie, en particulier juive allemande. Celui d’un jeune philosophe qui entend Theodor Adorno et Max Horkheimer prendre acte de l’éclipse de la raison à Auschwitz, mais voit dans la déconstruction de toutes les valeurs le prélude au cynisme. Celui d’un restaurateur du « kantisme » en France qui mesure sur le tard que l’œuvre de Nietzsche est ce qu’on a produit de plus profond philosophiquement. Celui d’un défenseur de l’éthique des Modernes qui découvre que, pour faire face aux questions extra-morales sur le sens de la vie, L’Odyssée d’Homère est indépassable. Celui d’un ministre ambitieux qui se rend compte que les bonnes intentions – lutter contre l’illettrisme, par exemple – ne suffisent pas en politique. Si, comme il l’annonce ici, il a renoncé à la politique, Luc Ferry prétend faire œuvre plus utile en forgeant une nouvelle spiritualité pour notre temps. A ses yeux, la valeur ultime de nos vies ne réside plus en Dieu, la Nation ou la Révolution, mais dans l’Amour. Brillant ou candide ? Les deux, sans aucun doute.
Par Martin LEGROS et Alexandre LACROIX – PHILOSOPHIE MAGAZINE