« Vaste sujet que celui de l’exposition The Color Line au Musée du Quai Branly. Comment résumer en 60 chansons la relation des artistes africains-américains à la ségrégation ? Pari tenu par Bruno Blum qui édite une anthologie raisonnée (et résonnante) sur plus de cinquante ans de musiques. Dry Bone Shuffle ou les squelettes qui reprennent vie dans le désert… vous aurez peut-être reconnu auparavant Duke Ellington et « Black and Tan Fantasy » en 1927 (thème qui fut même l’objet d’un des premiers films de jazz…). Entrée toute indiquée dans l’exposition The Color Line qui se tient au Musée du Quai Branly à Paris. « Les artistes africains-américains et la ségrégation », vaste sujet où forcément la musique tient une part centrale. Et si vous ne pouvez visiter l’exposition, le coffret édité chez Frémeaux & Associés fait figure de consolation. L’anthologie très riche (60 chansons en 3 disques) a pour mission de résumer 50 ans de luttes et d’expressions et ce qu’on y entend relève autant du témoignage poignant (ou édifiant à écouter Marcus Garvey) que du sublime. Le coffret commence par un enregistrement de 1916 « Rall Out ! Heave That Cotton » (Dépêchez vous et chargez-moi ce coton) chanté par le Harry C Browne, un de ces black face minstrels, ces comédien et chanteurs blancs maquillé en noir pour mieux les caricaturer, l’enregistrement le plus récent sera celui de Curtis Mayfield qui en 1962 chante Minstrel and Queen, la boucle est bouclée. Le jazz tient forcément une place de choix dans ce coffret Color Line (Cab Calloway, Billie Holliday, Monk, Coltrane) et l’on retrouve Duke Ellington aux commandes de sa suite symphonique « Black Brown and Beige » et Joya Sherrill chante « The Blues ». »
Par Mathieu CONQUET - FRANCE CULTURE (MATINALE :"L'ACTUALITÉ MUSICALE")