Les étiquettes, ça vous colle à la peau. Même 22 ans après sa mort, et 74 ans après ses premiers triomphes discographiques, Marise Damien, dite Damia, sera toujours la Tragédienne de la chanson. Qu'importe qu'elle ne soit pas cantonnée au répertoire dramatique (des trucs comme Ploum, ploum, ploum visait à la rapprocher de Fréhel, qui avait la faveur du populo), c'est dans le registre du pathos qu'elle s'est forgée une légende. Il suffit de parcourir les 36 titres de Damia 1926-1944 ( Frémeaux et Associés FA 167/Importation) pour s'en convaincre. Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'on ne rigolait pas outre mesure, chez Damia. Oscillant dangereusement entre le mélo et le macabre, entre l'eau de vie et l'eau de rose, des tableaux comme La veuve, Tout fout l'camp, La hantise, La malédiction, J'ai l'cafard exigeaient une maîtrise parfaite des effets pour passer la rampe. Le fait qu'une invective comme La suppliante puisse encore nous prendre aux tripes aujourd'hui est bien la preuve qu'elle avait visé juste. Hormis les quelques incontournables (parmi lesquels on retrouve Les goëlands et La guinguette a fermé ses volets), ce survol - amoureusement compilé et annoté, comme à l'habitude, par les gens de chez Frémeaux - est remarquable par l'inclusion d'un Sombre Dimanche, traduction française d'une complainte hongroise qui avait été bannie chez les Magyars pour cause d'incitation au suicide, et que l'on retrouverait bientôt, sous le titre de Gloomy Sunday, dans le répertoire de Billie Holliday. Comme quoi le cafard ne connait pas de frontières. L'EXPRESS
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